ENTRETIEN pour THEATRORAMA

Publié le 03 novembre 2009 par Oppert

L'entretien mené par Emma SCALI est en ligne (entre ceux d'Obaldia et de Zavatta (!)) sur le site de THEATRORAMA en cliquant là !

L'intégralité des questions/réponses se trouve ici :

Benjamin Oppert ou les Tentations Electives

L’auteur des Tentations électives se confie en attendant de fêter sa pièce à l’affiche depuis un an. Le théâtre ? Un terrain inconnu il y a encore deux ans, balisé grâce à l’écriture…

Quel est votre parcours ?

Je suis Juriste de formation. D'ailleurs je sens que ça m'aide à écrire des pièces, à ciseler les répliques, à amener les intrigues de façon rigoureuse. J'ai été Chef de Cabinet d'un Maire. Aujourd'hui, je travaille à temps-plein dans le secteur médico-social. Je suis aussi la "plume" de nombreuses personnalités. J'écris leurs discours.

Comment est venue votre envie d'écrire ?

L'écriture, sous différentes formes, est très présente dans ma famille. Mon arrière-arrière grand-père, Jules OPPERT, a été au 19ème siècle, le déchiffreur français de la toute première écriture, l'écriture cunéiforme de Mésopotamie utilisée à Babylone, c'est à dire dans l'Irak actuelle. Ma mère, quant à elle, est graphologue. J'ai donc toujours été sensibilisé à la force de l'écriture. Quand j'étais enfant, j'avais besoin d'exprimer une certaine violence que je contenais en moi. Il y a des gosses qui font du judo, j'ai préféré pratiquer les mots. Ce que j'écrivais, à l'époque, était très noir et très rouge...

Pourquoi avoir choisi de vous exprimer à travers l'écriture dramatique ? 

Pour ce que j'avais à dire et à décrire, la forme théâtrale s'est imposée d'elle même. Les sujets que j'avais envie de traiter dans ma première Pièce - la vie d'une Mairie, les relations entre introvertis et extravertis - c'était fait pour être mis en scène. Ensuite, le succès de "Entre Père et Maire" m'a poussé à en écrire une deuxième : j'avais de nouvelles choses à dire, j'avais envie de me prouver que je pouvais aller au bout d'un deuxième projet d'écriture, je voulais approfondir, mettre en pratique, sur le plan technique, ce que j'avais appris de ma première expérience.

Ecrivez-vous d'autres types de texte?

Les discours bien sûr. J'aime alterner les styles d'écriture. J'aime bien faire des descriptions, que ce soit de personnages ou d'atmosphères et ça, bien sûr, on ne peut pas le faire dans une Pièce. Je me suis donc lancé dans l'écriture d'un roman. Il y a quelques années, j'ai écrit des chansons. C'était amusant de construire un refrain, de composer des rimes.

Et si vous aviez une pièce de théâtre ou un auteur dramatique à retenir ? Pourquoi ? Qui sont ceux qui vous inspirent ?

J'apprécie beaucoup Eric Emmanuel SCHMITT, le leitmotiv de son état d'esprit - la capacité de s'émanciper en étant délivré de soi-même - son aptitude à s'adresser à tout le monde, de façon universelle, sans clivages... Ca rejoint ce que je pense et dis : que nous ne sommes que des passe-plats de l'intelligence...

Sur quoi vous êtes-vous nourri pour écrire votre pièce ?

Je mets toujours beaucoup de vécu dans mes Pièces. Il y a un personnage qui est présent dans tous mes écrits, qu'il occupe le rôle principal ou non, c'est Alexandre, mon double littéraire. J'ai plutôt tendance à me montrer sous mes traits les plus sombres voire même à m'en inventer !

Sur le plan technique, j'écoute énormément de musique. Je ne pourrais pas vivre sans musique alors que je pourrais me passer de lecture. J'essaye d'aligner les mots de la façon la plus rythmée possible. Je suis très attentif au souffle, à la cadence, à la musicalité des phrases et des répliques, à l'enchainement des sonorités. Je suis un maniaque du placement de la virgule ! Je suis convaincu que c'est la musique qui m'a appris à écrire.

Pourquoi mêler théâtre et politique?

Théâtre et Politique et... l'Amour aussi ! Parce que ce sont trois mondes intemporels que j'ai explorés pour tenter d'en faire une comédie humaine et contemporaine. Ma Pièce n'est pas une Pièce politique mais sur la politique. Entre autres... Quand j'étais Chef de Cabinet, j'avais avec mon Maire une relation auteur/interprète pour ses discours. J'étais aussi son metteur en scène. Quand je me suis lancé dans le Théâtre, j'avais finalement des fonctions similaires.

Pensez-vous que faire du théâtre soit un acte politique?

On dirait un sujet du bac ! Bien sûr que faire du théâtre est un acte politique et civique mais au sens pur du terme ! Molière, Beaumarchais, pour ne citer qu'eux, étaient des penseurs politiques avant tout. Leurs écrits ont évidemment contribué à déclencher des évolutions, des révolutions.

Beaucoup de gens considèrent le Théâtre avant tout comme un divertissement. Pour ma part, je fais en sorte de mêler humour et profondeur. Le Théâtre doit permettre, à mon sens, par des créations, par des interprétations, d'analyser la société, de canaliser, de développer, de porter ou de critiquer l'état d'esprit des contemporains ou simplement de les décrire. Faire du théâtre est démocratique.

Vous êtes-vous inspiré des œuvres d'autres auteurs pour cette pièce en particulier ?  Lesquels ?

Autant pour ma première Pièce, "Entre Père et Maire", la construction des Mains sales de Sartre m'a inspiré sur le plan technique, autant pour "Les Tentations Electives" je n'ai pas le sentiment d'avoir été inspiré ni influencé par d'autres oeuvres en particulier. Je vais finalement assez peu au Théâtre. Peut-être que ça m'a permis de créer une certaine "originalité" dans mes Pièces. C'est en tout cas un des mots qui revient dans la bouche des spectateurs.

Quelle a été la genèse de l'écriture ? Y a-t-il eu plusieurs versions de la pièce? 

A 30 ans, ça m'amusait de me glisser dans la peau de deux quinquagénaires : l'un qui fuit les honneurs, l'autre qui court après... J'ai écrit la Pièce en un mois. Il a bien sûr fallu ensuite adapter quelques détails pour dépasser le stade de l'écrit et le faire vivre, scéniquement parlant...


Quels sont les rapports que vous entretenez avec les comédiens et le metteur en scène?  

Je m'entends très bien avec tout le monde : Philippe BRIGAUD, le metteur en scène, Barbara BERGONIER, son assistante, qui ont fait un travail remarquable. Avec les comédiens : Christine MELCER, Michel PILORGE, Aurélien CHARLE qui sont des comédiens avec un réel talent, très professionnels. 

Il n'y a qu'un des comédiens avec lequel j'ai plus de mal, c'est celui qui interprète le rôle de Pierre Escabeau et c'est.. mon père...  Mais quel est le fou qui a eu l'idée de lui confier le rôle principal ???  Non je plaisante : il est vraiment au niveau de ce grand personnage haut en couleurs, un glorieux comédien qui a toujours été un autre et qui ambitionne d'être enfin lui-même...avec beaucoup d'humour et d'émotion...

Cette aventure commune des "Tentations Electives" nous a donné, avec mon père, la possibilité de mieux communiquer entre nous, ce qui était assez difficile jusque là, de parler un dialecte commun... Qui sait ? J'ai peut-être écrit du théâtre pour lui parler dans son langage à lui, dans le domaine qui le touche plus que tout, avec ses mots à lui ? On s'est parfois beaucoup engueulé pendant les répétitions mais au moins on communiquait ! Aujourd'hui, il y a une très bonne ambiance dans la troupe. Heureusement ! Ca fait 10 mois que notre spectacle est joué maintenant et des Mairies sont intéressées pour le programmer. En tout cas, on est toujours content de se retrouver. On y croit tous beaucoup !

Entre votre début de carrière et aujourd’hui, avez-vous évolué dans la perception que vous aviez du théâtre ? 

Mon début de carrière, c'était hier ! J'ai écrit ma première ligne pour le Théâtre il y a deux ans. Avant que je commence à écrire des Pièces, c'est vrai que le milieu théâtral me paraissait vieillot, poussiéreux, avec une odeur dérangeante de naphtaline. Aujourd'hui, je lui suis reconnaissant de me permettre de m'exprimer mais aussi de m'offrir ce contact privilégié, immédiat, interactif avec le public. C'est très intéressant de s'apercevoir que des spectateurs se reconnaissent dans le personnage d'Alexandre alors que, au départ, c'est mon double littéraire ! 

Quels sont vos projets ?

Fêter l'anniversaire des TENTATIONS ELECTIVES. En décembre, cela fera un an que la Pièce est à l'affiche. En ce moment, elle est programmée en plein coeur de Montmartre le Samedi à 18 h et le Dimanche à 19 h 30 dans un Théâtre très sympa, le FUNAMBULE-MONTMARTRE. Mes projets : continuer à construire (c'est mon occupation préférée) : la poursuite de mon roman, la gestation de ma 3ème pièce...


Les Tentations électives, le samedi à 18 h et le dimanche à 19 h 30 à PARIS 18ème au Théâtre du Funambule Montmartre

Infos et réservations : 01 42 23 88 83 ou FNAC et CARREFOUR