Et bien, quand je pense à 1992, je pense à Kris Kross. Je pense à cette période qui marque mes premières vraies rencontres avec le Hip-Hop et la culture qui y est associée. Parce que j'ai beau avoir eu un choc avec Public Enemy quelques mois plus tôt, rien ne remplace un vrai tube "pop" pour vous immerger dans une culture. Parce qu'à 12-13 ans, les subtilités, les détails, les messages, vous vous en foutez violemment. Ce qui vous intéresse, c'est que ça sonne bien aux oreilles et que ça vous fasse sautiller. C'est déjà ce qui me plaisait quelques mois plus tôt dans De La Soul et particulièrement leur seul vrai tube en France, "Ring Ring Ring".
A cet âge là, vous n'en avez rien à branler des messages, de l'impact culturel, du "mouvement", des "origines" et encore moins des paroles. Donc quand vous écoutez "Jump" de Kris Kross, vous n'entendez que les choses qui vous font aimer n'importe quel autre tube pop qui innonde la FM : le beat infernal, le flow bien calé et le refrain accrocheur.
Mais vous avez beau être insouciant, vous apprenez. Petit à petit. Un code à la fois. Vous découvrez qu'ils viennent d'Atlanta, ce qui vous ouvre les yeux deux ans plus tard sur un autre groupe de la ville : Outkast. Vous apprenez qu'ils sont dans la vidéo de la chanson de "Down with the king" et vous découvrez à la fois RUN DMC et PETE ROCK & CL SMOOTH. Et ainsi de suite : vous vous forgez votre propre culture musicale Hip-Hop. Tout ça juste grâce à un tube pop !
Ensuite, il y a le petit "truc" en plus : le look. Que ce soit pour un fan de heavy-métal, un fan de pop ou un fan de rap, le style vestimentaire, la coupe de cheveux, c'est déterminant dans la puissance de votre engouement. Et quoi de plus puissant que des vêtements portés à l'envers ?
Les jeans baggy, les Timberland, à l'époque, c'était un peu nouveau pour moi (NTM ou Public Enemy n'en portaient pas !) mais ça a quand même été une sacrée révélation. Mon style des 5 années à venir allait en être tout chamboulé. Direction Paris station Chatelet Les Halles pour arpenter les deux-trois magasins de vêtements hip-hop que comptait (alors) la Capitale (Ekivok pour nommer le seul dont je me souviens).
Et vous savez quoi ? Comme je suis quelqu'un de très fidèle, je ne me suis pas arrêté à ce tube pop parmi les tubes pop. Au grès des années 90, j'ai continué à écouter Kris Kross... Tout simplement parce que le son était toujours aussi bon ! La preuve : ALRIGHT, I'M REAL, LIVE & DIE FOR HIP HOP etc.
Vous remarquez comment tout ça n'a pas pris une ride... On n'en fait plus des comme ça ! Tout d'un coup, j'ai un gros pincement au coeur. C'était bien les années 90 quand même...