Après avoir commis deux albums fort réussis dans la belle collection Atmosphères chez EP que je vous conseille d'ailleurs chaudement - Gloriande de Thémines et Lady Tara Cornwall -, le dessinateur Pascal Croci clôture sa trilogie féminine avec une figure mythique, la comtesse sanglante Erzsébet Bàthory, naît en 1560.
Présentation de l'éditeur : En Hongrie, au XVIe siècle, des jeunes femmes disparaissent et des rumeurs se répandent à propos de la jeune comtesse. Elle organise des orgies, torture et tue ses victimes, puis se baigne dans leur sang afin de gagner la jeunesse éternelle.
Quelques lignes : "Journal de Jonathan Harker. Hôpital Saint-Joseph et Sainte-Marie, Budapest, 13 août... Je pensais ne jamais reprendre ce journal, mais il me semble que je doive à nouveau écrire... J'ai si mal dormi, sans doute à cause de cette maudite piqûre ! J'ai rêvé que je rêvais, et je me réveillais dans mon rêve, tout en me croyant dans la réalité."
Sanguinaire, ambiguë, sulfureuse, immorale… les qualificatifs qui dépeignent Elizabeth Bàthory sont légion. Cette descendante
des princes de Transylvanie mourut en 1614, assignée à résidence durant 4 années dans son château de Čachtice, situé dans les Carpates, après avoir été condamnée pour torture et meurtre.
Entre histoire et légende, Pascal Croci et Françoise-Sylvie Pauly retracent via une interprétation toute personnelle et sans tabou aucun, le destin subversif de cette aristocrate
hongroise qui inspira à l’écrivain irlandais Sheridan Le Fanu, l’un des textes fondateurs de la littérature vampirique : Carmilla paru en 1871. L’album Elizabeth Bàthory achève ainsi le cycle sur le thème du vampire instauré avec le précédent dyptique dédié à Dracula -
Le prince valaque Vlad Tepes et Le mythe raconté par Bram Stoker. De plus, le fil rouge n’est autre que Jonathan Harker et son fameux journal où sont consignés les
évènements qui nous intéressent ici, associés à des extraits du procès.
De l’enfant précoce à l’adulte pétrie de vices qu’est devenue la comtesse, le lecteur assiste à la naissance d’un monstre. Cette folie meurtrière qui l’anime est remarquablement contée.
L’écriture de Françoise-Sylvie Pauly est à la fois raffinée et glaçante. Les sentiments qu’elle véhicule sont amplifiés par le trait torturé et subtil de Pascal Croci toujours aussi à
l’aise quand il s’agit d’unir esthétisme et horreur. Ce dernier a d’ailleurs le bon goût d’alterner les scènes scabreuses et sanglantes se déroulant dans les hautes salles d’un château
gothique avec le saisissant spectable d’une nature à la beauté sauvage, emmitouflée sous une chape de neige que percent seulement montagnes austères et forêts décharnées à l’image des
personnages qui les traversent. Tour à tour dérangeant et fascinant, Elizabeth Bàthory s’adresse avant tout à un public averti. Voilà un mythe qui n'a pas fini de faire couler de
l'encre.