Ce soir on vous propose une rencontre avec une jeune architecte d’intérieur éco sensible récemment installée en Catalogne. Rencontre avec une passionnée qui va nous expliquer son engagement et les principes de l’éco-construction moderne.
- Alexandra, on entend de plus en plus parler d’éco-construction, mais on ne sait pas vraiment ce qui ce cache derrière… Pourriez-vous nous en dire plus ?
- Depuis l’invention du béton armé et la prolifération des matériaux synthétiques, les bâtisseurs, séduits par la possibilité de construire vite et facile, se sont employés à nous loger et à nous faire travailler dans des espaces hermétiques et non pérennes, mettant en danger notre santé et celle de la Terre. La « mode » actuelle est de dire que rénover ou construire écolo c’est acheter du bioclimatique – cellules solaires, géothermie, chauffage aux granulés…
Une maison dite passive fait en effet appel à ces techniques afin d’être auto-suffisante en énergie, mais on oublie trop souvent les matériaux de construction. Une maison écologique est non seulement bioclimatique, mais est surtout conçue et réalisée avec des matériaux sains, c’est-à-dire non modifiés par l’homme, élaborés avec le minimum d’énergie grise, et biodégradables lors de la déconstruction de l’édifice. Heureusement, il existe une solution écologique pour remplacer chaque technique agressive ou matériau polluant, aujourd’hui obsolètes et indigestes.- Quel est votre métier? Quel est votre parcours? Pourquoi et à quel moment vous êtes-vous intéressé à l’éco construction?
-Etre architecte d’intérieur, ou designer d’espaces, c’est réfléchir à l’espace de vie, qu’il soit privé, professionnel ou public. Plancher sur son optimisation, sur la fonctionnalité des pièces et l’ergonomie du mobilier, agencer les lieux pour respecter au maximum la manière dont évoluent les occupants. C’est aussi créer les ambiances en pensant l’éclairage, en guidant dans le choix des couleurs et de la décoration. Le designer d’espace est là pour avoir des idées parmi lesquelles le client découvrira celle qui lui va comme un gant.
J’ai d’aussi loin que je me souvienne été intriguée par l’aménagement des espaces, faisant et défaisant le salon de mes parents jusqu’à ce que le mouvement des habitants soit le plus fluide et logique possible dans leurs activités quotidiennes. Poursuivant mes études dans une filière classique, ce n’est qu’en 2004, lorsque j’ai pris conscience de la catastrophe écologique qui nous attendait, que j’ai voulu apporter ma contribution dans ce que je savais le mieux comprendre : l’espace. J’ai foncé dans une école de design où j’ai passé deux ans puis j’ai travaillé trois ans dans des agences de design global et d’archi sur Paris.-Qu’est-ce que d’être architecte et architecte d’intérieur spécialisé en éco-construction ?
Quelles sont vos premières préoccupations ?-Un éco-architecte conçoit et fait construire des maisons ou des bâtiments avec les matières premières offertes par la terre : du bois, de la paille, de la terre crue, de la chaux, de la pierre, de la laine de chanvre ou de mouton… en y incluant bien sûr les énergies renouvelables.
En tant qu’éco-designer d’espace, j’interviens plutôt en rénovation, en restructuration ou aménagement d’espaces existants (réhabilitation de locaux en habitation, agencement de bureaux, création d’une boutique…). Je réfléchis dès la première visite à ce qui peut être conservé ou transformé afin d’économiser les ressources, je pense dès les premières esquisses aux techniques et aux matériaux que je proposerai selon le budget du client. Le projet se construit donc autour d’une réflexion écologique, fonctionnelle et esthétique, et sera réalisé par des artisans spécialisés en techniques vertes.
Je suis aussi très sensible aux principes du feng shui que je prends en compte lorsque j’imagine les espaces et les volumes. J’essaie de dessiner un plan d’électricité de manière à ce que les occupants soient le moins exposés à la pollution électromagnétique (box internet sur le bureau, appareils branchés à la tête de lit… sont autant d'agressions à des endroits où l‘on passe du temps).
Mais attention, on n’est pas obligé de choisir entre le beau et l’écolo ! Au contraire, je souhaite vraiment ancrer l’éco-design dans notre temps. Les lieux conçus doivent être modernes, agréables et pleins de vie. C’est pourquoi selon le budget et les envies, on fait ensemble les compromis les plus cohérents pour se sentir bien sur une Terre respectée !-Est-ce que les catalans vous semblent intéressés par l’éco-construction ? Comment peut-on trouver des professionnels de l’éco-construction ? Y-en-a-t-il dans les P.O. ?
Etes-vous regroupés en fédération ?-Je ne suis installée dans les P.O. que depuis une petite année mais j’ai l’impression que les considérations écologiques sont en train de prendre de plus en plus leur place ici. Il n’y a pour l’instant que peu de rénovations respectant les critères écologiques, néanmoins il se passe des choses… Les premières rencontres de l’éco-habitat ont eu lieu au mois de septembre à Argelès, dans le cadre des 6 mois bio/écolo des Enfants de la Mer… Une association vient de se créer, A.D.O.B.E., dont le but est de promouvoir l’utilisation du bois et l’éco-construction et qui devrait également proposer des chantiers écoles…
Enfin, ce qui est très encourageant c’est qu’il y a une trentaine d’artisans labellisés « éco-artisan » dans les P.O., dans tous les secteurs du bâtiment, donc des maçons, électriciens, plombiers, menuisiers… C’est absolument capital parce que ça veut dire que maintenant lorsqu’une famille veut construire ou rénover une habitation, elle peut trouver des professionnels qui utiliseront des techniques et des matériaux propres.
Ce qui manque encore un peu, ce sont des architectes et des entrepreneurs qui incitent les clients à construire leur habitation selon les principes de l’éco-construction… C’est donc pour ça que je suis là, c’est mon ambition !-Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à une personne souhaitant construire ou rénover son habitation selon les principes de l’éco-construction ?
-Tout d’abord il faut savoir que le fait d’avoir un architecte ou un architecte d’intérieur pour sa construction ou ses travaux n’est pas un luxe ! Car les honoraires seront à la fin du projet, totalement noyés dans les économies réalisées sur les matériaux dont il aura pu, en tant que professionnel, négocier les prix. L’architecte épluche aussi les devis et sait juger de la qualité et du prix du travail d’un artisan, ce qui fera gagner du temps et de l’argent. Au final, le client a un produit harmonieux, fonctionnel et plein d’astuces pour les mêmes dépenses !
En ce qui concerne l’écologie, il y a selon moi deux idées reçues sur l’éco-construction. La première est d’imaginer que nos intérieurs vont ressembler à ceux de nos ancêtres moyenâgeux, et l’autre de croire qu’il faut être riche pour se permettre d’y recourir. Encore une fois, la question de coût peut être réglée par des compromis. Ça se passe comme ça en architecture traditionnelle, c’est la même chose en écologie ! Le but est vraiment de polluer le moins possible l’air qu’on respire, et de s’attacher à choisir des matériaux nobles. Quant au bioclimatique, il n’est plus à prouver que c’est un investissement et non une dépense.
Pour ce qui est de l’esthétique, sachez qu’il y a bien plus de vibrations et d’intensité dans la couleur des pigments naturels que dans les peintures fabriquées en magasin… On peut décidément créer des ambiances réjouissantes et ultra-design avec de l’acier, du grès, du parquet massif et de la chaux. Ouf, ça tombe bien, on est en 2009 !
Pour plus de renseignements le site d’Alexandra Deblaton