“This is it”, la grande révérence

Par Kub3

Une centaine d’heures de rushes pour n’en garder au final qu’1h50 : autant dire que le réalisateur de This is it a eu l’embarras du choix en puisant dans les répétitions de Mickael Jackson au Staples Center de Los Angeles, en prévision de sa série de concerts à Londres l’été dernier. Les images, tournées initialement de mars à juin 2009 pour l’utilisation privée du chanteur, se retrouvent ici compilées dans un documentaire adressé avant tout aux fans. Kenny Ortega, initialement coordinateur et chorégraphe du spectacle, risquait fort de tomber dans l’hommage rasoir ou larmoyant. Que nenni. En se concentrant sur les répétitions, sans voix off et avec très peu d’interviews, le film fait avant tout la part belle à la musique.

© Sony Pictures Releasing France


Montées entre elles à la manière d’un clip pour chaque chanson interprétée, les images se font le reflet d’un concert qui n’aura jamais vu le jour. Leur qualité est inégale - les plans ne sont pas très variés, le grain de l’image laisse parfois à désirer -, mais le montage très dynamique donne un relief inattendu aux prestations scéniques de l’artiste et rend bien compte de l’ambition de l’événement en préparation. A la question “Mickael Jackson était-il en mesure d’assurer la totalité des concerts prévus ?”, le film semble livrer sa réponse sans ambigüité. Professionnel et d’une grande application, le Roi de la pop - certes amaigri - danse et chante avec perfection, quand bien même il affirme se ménager pour le jour J.

Sa seule présence à l’écran suffit au plaisir des yeux, tandis que le documentaire divulgue peu le peu le contenu démesuré d’un spectacle total. Performance vocale (dont un surprenant duo avec une choriste dépassée par l’émerveillement sur I can’t stop loving you), chorégraphies hallucinantes, pyrotechnie et effets visuels : la mise en scène rend compte des multiples facettes de celui qui a aussi révolutionné le clip vidéo. Parmi les moments forts du documentaire se détache ainsi le tournage de nouvelles scènes pour le clip de Thriller, ou encore cette rencontre entre Mickael Jackson et Humphrey Bogart dans Gilda, sur la musique de Smooth Criminal. Face à toute l’inventivité mise en place, on en oublierait presque le discours humaniste bien pensant de l’artiste, notamment dans une parenthèse écolo qui jure singulièrement par rapport au reste.

A la frontière entre clip et making of, This is it conjugue le portrait du mythe avec celui de l’artiste. Contrainte de ne pas écorcher son aura mystique, la réalisation privilégie la scène aux premières répétitions effectuées en amont, même si les images les plus intéressantes resteront sans doute celles de Mickael Jackson au travail avec ses musiciens. Jusqu’au moindre riff de guitare, les arrangements de ses chansons n’ont aucun secret pour lui. Dans ces moments malheureusement trop rares, le documentaire laisse alors entrevoir le technicien exigeant derrière le génie, l’humilité d’un homme derrière son grand talent.

Le montage met de côté de nombreux aspects des préparatifs des concerts - en premier lieu le stress et les incertitudes évidentes liées à la santé physique du chanteur. Mais, film-spectacle bien plus que film-vérité, This is it rend à Mickael Jackson un hommage posthume respectueux et sobre. Son come back après plusieurs années de grande discrétion se devait d’être exceptionnel. Si le sort n’en avait pas décidé autrement, il l’aurait sans doute été.

En salles le 28 octobre