On n’a pas suffisamment souligné la grande ingéniosité du plan cancer présenté lundi 2 novembre à Marseille par Nicolas Sarkozy. Et en particulier, le volet qui concerne la lutte contre les inégalités sociales et géographiques face à la maladie. Les pauvres sont en effet beaucoup plus touchés que les riches, et certaines régions plus épargnées que d’autres. Ces discriminations sont évidemment intolérables, et tous les français devraient avoir un accès identique à la maladie, indépendamment de leurs revenus et de leurs origines.
Pour combler ces différences, et notamment les disparités sociales, le gouvernement a étudié toutes les hypothèses possibles. Il n’existe en fait que trois solutions.
- La première consiste évidemment à soigner plus de pauvres afin de réduire l’écart. Cette solution présente de nombreux avantages, mais aussi un inconvénient majeur. Elle n’est pas très équitable. Il n’y a en effet aucune raison que si l’on parvient à soigner plus de pauvres, les riches ne puissent pas profiter également des avancées médicales et scientifiques. Cette solution a donc été rejetée par le gouvernement.
- Deuxième solution : faire en sorte que plus de riches attrapent le cancer, ce qui aurait là aussi pour effet de réduire les disparités. Problème : il n’est pas certain que les riches se montrent très enthousiastes à l’idée de collaborer à la réussite de ce plan ambitieux. Déjà peu enclins à fumer du vieux tabac et des cigarettes sans filtres, à boire en grande quantité des alcools frelatés et des mauvais vins, à s’empiffrer de charcuterie grasse et bon marché, il est encore moins sûr qu’il acceptent de vivre près des centrales de retraitement ou des usines chimiques, sous les pylônes électriques, ou bien encore de s’adonner professionnellement au bitumage des chaussées et au ponçage intensif de matériaux hautement cancérigènes. Bref, cette solution ne présente aucune garantie de succès, elle a donc été également rejetée avec une certaine forme de soulagement par le gouvernement.
- Ne reste donc plus en toute logique qu’une seule solution pour réduire le fossé entre les catégories sociales : rendre riches les cancéreux pauvres. C’est cette solution qui a recueilli les suffrages du gouvernement. 730 millions d’euros ont été dégagés à cet effet. On ne sait pas si cette somme suffira, mais cela devrait en tout cas contribuer à combler une partie du fossé.
Pour ce qui concerne les inégalités géographiques, le gouvernement a adopté la même méthode de réflexion. Là encore, il aurait été inéquitable de ne soigner que les malades des régions très touchées, et pas les autres. Tenter par ailleurs de booster la maladie dans les régions épargnées se serait là aussi révélé sans garantie de succès aucune. La solution retenue est plus simple et nettement moins coûteuse que pour combler les différences sociales : il suffira de déplacer une partie de la population cancéreuse des régions très touchées par la maladie vers des régions plus préservées.
Et ainsi, on ne pourra pas dire que le gouvernement n’a pas tenu ses promesses de réduire les disparités sociales et géographiques face au cancer.
Institut National du Cancer: www.e-cancer.fr
Olivier Zilbertin.