Industrie : pour des états généraux utiles, M. Estrosi doit aborder tous les enjeux
L’installation aujourd’hui du « Comité national des Etats généraux de l’industrie » se déroule alors que le tissu productif du pays vit une crise profonde dont les ressorts – la mise en concurrence des territoires, des savoir-faire et des salariés – étaient à l’œuvre bien avant la crise financière de 2008. Face à cette logique de désindustrialisation en France et en Europe, les gouvernements qui se sont succédé depuis 2002 ont fait preuve d’une impuissance coupable qu’une communication médiatique ne saurait ni éclipser ni excuser.
Pour être vraiment utiles, les « Etats généraux de l’industrie » ne sauraient faire silence sur deux enjeux vitaux : la cohérence et la transparence du soutien financier de l’Etat aux secteurs dans la tourmente ; l’usage de l’euro au service de la production et de la croissance verte. A ce jour, ces sujets ont malheureusement été absents des discours et des décisions du ministre de l’Industrie.
L’actuel fonctionnement du Fonds stratégique d’investissement (FSI) et du Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA) ne permet pas à l’industrie française d’affronter la crise. En attendant la création d’un fonds pour les équipementiers de « rang 2 », les aides du FMEA ne s’adressent qu’aux sous-traitants de « rang 1 ». Doté de 600 millions d’euros, il n’est pas à la hauteur du choc qui frappe les fournisseurs du secteur automobile. Selon les experts, celui-ci pourrait être amputé de 400 entreprises et de 20 000 à 30 000 emplois sur l’année. Le gouvernement doit élargir le champ d’application des aides du FMEA à l’ensemble des PME de la sous-traitance, qu’elles travaillent ou non avec les constructeurs. Le maintien d’un tissu de sous-traitants de proximité dans nos territoires est indispensable à une présence durable des constructeurs en France.
Autre mystère : les contreparties fixées à l’intervention du FSI. Parlementaires et organisations syndicales ont maintes fois réclamé que la lumière soit faite, qu’il s’agisse du renforcement des fonds propres ou des prises de participation. Quant aux contreparties fixées aux groupes aidés, en termes de maintien de l’emploi ou d’engagement de production pour pérenniser les sites en France, elles sont pour le moins brumeuses… Le Parti socialiste espère que la nomination du président du conseil d’orientation du FSI à la tête du « Comité national des Etats généraux de l’industrie » permettra d’éclaircir cette situation.
Avec la transparence et l’efficience des aides, la politique monétaire est l’autre grande oubliée de la politique gouvernementale. Le taux de change de l’euro n’est toujours pas une préoccupation de la Banque centrale européenne. L’appréciation de l’euro par rapport au dollar handicape lourdement l’industrie européenne. Ainsi, quand l’euro s’apprécie de 10 centimes, EADS perd un milliard ! En l’absence de coordination politique, la monnaie unique peut fragiliser l’un des fleurons de notre industrie et ses milliers de sous-traitants. Pour contrer cette tendance, la BCE et les Etats membres doivent adopter une politique de taux d’intérêt plus offensive et lancer un plan d’investissement européen afin de financer les éco-industries et les bio/nanotechnologies européennes.
Ne pas aborder ni régler ces questions, ce n’est pas organiser des assises de l’industrie, c’est accepter la désindustrialisation sans agir.
Communiqué de Guillaume Bachelay,
Secrétaire national à l’industrie, aux entreprises et aux nouvelles technologies