Dimanche, Rama Yade s'est faite sévèrement taclée par sa collègue du gouvernement Nadine Morano. La Sarkofrance ces temps-ci ressemble à une Cour. On le sait. L'Express en a fait son dossier de la semaine.
Rama Yade, l'incomprise.
L'ancienne secrétaire d'Etat aux droits de l'homme est une énigme. Devenue quasi-ministre par le seul fait du Prince, devenu Monarque en mai 2007, Rama Yade a cru qu'elle était brillante. En fait, elle n'était que noire, belle et intelligente. Depuis, elle s'est spécialisée dans le pas de deux : "je gueule, puis j'me couche". Quand Sarkozy recevait, une semaine durant, l'un des pires dictateurs du moment, à l'occasion de l'anniversaire de la Déclaration des Droits de l'Homme de l'ONU de 1948, Rama Yade confie publiquement son indignation. Puis elle se rétracte, après un savon subi de l'Elysée. Quand elle met en garde contre un décrochage élite/opinion au plus fort de l'affaire népotique du placement du Prince Jean à l'Epad, elle se rétracte à nouveau quelques jours plus tard.
Rama Yade n'a pas d'autre choix. Sa popularité ressemble à celle d'un Kouchner, populaire pendant des décennies dans d'obscurs baromètres publiés par le Journal du Dimanche : une popularité sondagière et politiquement inutile. Dimanche, Nadine Morano, secrétaire d'Etat à la Famille, a tancé sa collègue : "Quand on n'est pas d'accord avec la politique menée par le gouvernement, c'est simple : 'ou on ferme sa gueule, ou on démissionne', vous connaissez l'adage". Rama Yade s'était exprimée contre l'adoptation d'un amendement taxant les droits d'image des grands sportifs. Mais Rama Yade n'est pas seule à grogner dans les rangs umpistes. Lundi, interrogé dans La Matinale de CANAL+, Frédéric Lefebvre a "excusé" ces parlementaires UMP qui critiquent l'(in)action du gouvernement (taxe professionnelle, bouclier fiscal, débat sur l'idetnité nationale, etc). Il a mis ces agitations sur le compte de la réforme constitutionnelle : "la réforme de la Cosntitution c'est plus de pouvoir au Parlement" . "Simplement, il faut que les parlementaires fassent des propositions." "En même temps, il y a des réformes sur lesquelles on ne peut pas reculer, il y a des engagements qui ont été pris."
Mais pourquoi est-il si méchant ?
Le quotidien suisse le Temps s'interrogeait récemment sur le caractère du monarque élyséen : "Mauvaise passe pour un Sarkozy irritable" titrait-il. "certains observateurs croient l’Elysée revenu aux heures sombres de l’automne 2007, lorsque Nicolas Sarkozy, déstabilisé, s’efforçait d’oublier son divorce dans les soirées, puis s’était laissé distraire par sa romance très médiatisée avec Carla Bruni". Nicolas Sarkozy a de quoi être irrité, moins par les états d'âme de quelques "proches" qui préfèrent se répandre anonymement dans la presse - Rama Yade exceptée - que par les attaques sur sa "morale", lui qui avait bâti sa campagne sur ce thème en 2007. Rappelez-vous les attaques contre "l'esprit de mai 1968".
Autre sujet d'agacement, la presse rejoint les humoristes pour railler ses discours "rediffusés", pré-fabriqués et mis en scène. Le Net reste en pointe. L'excellent bienbienbien.net est allé fouiller les précédents discours du Monarque. Son bégaiement agricole de mardi dernier - quand il fut surpris répétant mot pour mot un discours vieux de 10 mois alors qu'il démarrait son intervention par un tonitruant "je ne suis pas venu vous tenir un discours que vous avez déjà entendu" - n'était pas le premier. Pas moins de 4 autres discours ont subi le même procédé de copier-coller...
Sarkozy reste chanceux. A gauche, seuls quelques-un(e)s ont osé attaqué la présidence sarkozyenne sur le terrain moral. Manuel Valls s'est permis une tribune. Benoit Hamon a failli être lynché. François Bayrou et Ségolène Royal se sont également exprimés. Les autres, du parti Socialiste à Olivier Besoncenot, se sont tus, "emmerdés" comme l'a expliqué le leader du NPA. "Emmerdés" d'avoir à entrer sur un terrain pourtant simple.
Identité nationale, le débat qui va déraper
Lundi, Eric Besson ouvrait son "grand débat" sur l'identité nationale. La veille sur France Inter, il se félicitait, dans une formule de langue de bois héroïque, de constater que le "peuple français s'est saisi du débat sur l'identité nationale", à en croire un sondage qui disait pourtant tout autre chose. Le même jour en effet, le Parisien publiait un sondage dont la question principale était partiellement biaisée : on ne demandait pas aux sondés ce qu'ils pensaient de l'organisation d'un tel débat à quelques mois d'élections, mais s'ils étaient prêts à débattre. D'ailleurs, un autre sondage, publié par CANAL+, interrogeait un échantillon sur le timing de l'opération. Et les résultats ne sont pas fameux pour le gouvernement : 64% des sondés estimaient que l'objectif principal du gouvernement est «avant tout» une «volonté de mobiliser les électeurs de droite en vue des élections régionales».
Pour le reste, l'organisation du débat est encore bien floue : dans l'urgence, le ministre a ouvert un site Web, et adressé une circulaire dès lundi aux préfets de région et de département pour fixer le cadre général des débats locaux. Le site internet annonce cinq rendez-vous, dont l'un, celui de l'Institut Montaigne, était prévu de longue date. récupérer tout ce qui traîne sur le sujet est de bonne guerre. Le 4 décembre à l'Ecole militaire (Paris VIIe), même le président français est annoncé. Les 4 autres "rendez vous" sont une réunion dans les bureaux d'Eric Besson avec des élus du Loiret, et trois autres, tenues par des élus locaux d'ici la mi-janvier 2010, dont les "modalités sont à définir". Le site Web appelle les internautes à contribuer ... en secret ! Mais la page de saisie des contributions est claire : l'internaute n'a d'autre choix que de cocher la case "Je souhaite vous faire part de mes idées, sans les rendre publiques." Un précision très curieuse, qui n'a rien avoir avec la modération nécessaire des commentaires.
Bref, on parle bien d'identité nationale, mais pour mieux dénoncer l'opération électoraliste de Nicolas Sarkozy.
Crédit photo: Le Temps