Euphorie de fin de mandat, incantation propitiatoire ou simple envie de communiquer positivement en direction des entreprises en période de « croissance molle » : le fait est que la Commission européenne a chaussé ses plus belles lunettes pour souligner la qualité de son action en matière d’allègement du fardeau administratif !
Dans le bilan qu’elle a dressé il y a quelques jours, elle estime en effet que l’Union européenne progresse bien vers l’objectif qu’elle s’est fixé de réduire de 25% d’ici à 2012 les coûts administratifs imposés par la législation communautaire. Toutefois les entreprises sont loin de partager cet optimisme et manifestent même une certaine grogne…
Calculette en main, il est exact que les mesures proposées par la Commission – et celles qui sont en préparation – devraient permettre aux entreprises d’économiser quelque 40 milliards d’euros… mais les formalités résultant de 72 textes juridiques communautaires, ainsi que des mesures qui les transposent et les appliquent dans les Etats membres, ont un coût évalué à plus de 123 milliards d’euros !
En plus, pour obtenir de façon relativement tangible ces 40 milliards d’euros d’économies, il faut que toutes les propositions faites par la Commission soient validées par le Conseil et le Parlement. Or deux d’entre elles - et non des moindres en termes d’impact (l’encouragement de la facturation électronique en matière de TVA et l’exemption des micro-entités de certaines obligations comptables) - sont loin de faire l’unanimité au Conseil. La Commission a donc beau jeu de renvoyer la balle aux co-législateurs « à qui il appartient désormais de faire en sorte que les entreprises sentent la différence sur le terrain ».
Par ailleurs, dans certains domaines tels que l’environnement, les services financiers ou la santé et la sécurité sur le lieu de travail, il ne s’est pas passé grand-chose, ce que BusinessEurope n’hésite pas à rappeler. En matière environnementale, par exemple, une majorité d’entreprises industrielles a en mémoire la mise en œuvre des directives DEEE et RoHS, qui ont suscité beaucoup d’émoi chez tous ceux qui manipulent des produits chimiques et ils sont fort nombreux. En plus, dans ce cas précis, le processus est loin d’être terminé puisqu’au dispositif européen se superposent désormais les arrangements internationaux (Système Global Harmonisé).
De toute façon, les entreprises doivent aussi batailler sur le plan national pour faire diminuer les contraintes qui pèsent sur elles et il est probable que, dans leur esprit, tout cela s’additionne…sans frontières.
Voilà qui explique, ainsi que le relève EUROCHAMBRES, pourquoi « les entreprises, qui dépensent encore trop d’argent et de temps dans le traitement de l’excès de bureaucratie et de réglementation, ont le sentiment que ces annonces positives ne correspondent pas à la réalité. »
Elles ont sans doute raison mais il ne faudrait pas, en considérant les choses sous un jour trop pessimiste, freiner la Commission européenne dans son action – incontestablement positive - en faveur d’allègements qui sont les bienvenus. De son côté, la Commission devrait se montrer plus mesurée et prendre davantage en considération le buisson d’épines administratives de tout ordre qui érafle chaque jour la peau des entrepreneurs…et qui, à juste titre, provoque bien des démangeaisons !