Pierre Silvain est mort vendredi dernier 30 octobre. Il ne verra pas son dernier livre qui sera publié sous la couverture jaune des éditions Verdier, livre dédié à Gérard Bobillier, décédé lui-même le 5 octobre1.
D’une extrême gentillesse, attentif à autrui, cet homme d’une immense culture était un écrivain discret, trop discret. Si on lui parlait d’un de ses romans anciens, comme Zacharie Blue, édité en 1968, il s’étonnait que l’on puisse encore le lire. Heureux que Julien Letrouvé colporteur ait été apprécié et ait eu un certain succès, il donnait de son temps pour rencontrer des lecteurs à Nantes, à Caen, à Besançon, à Paris ; dans ces soirées, il parlait de son livre avec une passion contenue et il en choisissait quelques passages qu’il détaillait d’une voix fragile.
Liseur d’une grande finesse, il a écrit à propos de quelques écrivains qu’il connaissait intimement : Büchner (Le Brasier, le fleuve), Jouve (Le Passage de la morte), Proust (Le Côté de Balbec), Loti (Le Jardin des retours). Non pas des études, mais à chaque fois des reconstructions amoureuses de l’univers d’un auteur, créations si surprenantes qu’elles m’ont conduit à relire les livres qu’il avait explorés.
Le dernier récit publié, Assise devant la mer, est un long poème en prose, histoire de son enfance au Maroc, histoire d’une relation fusionnelle entre l’enfant et sa mère qui ne s’achève qu’avec la mort de l’aimée, histoire pudique d’initiation, de formation. Si ancré dans son temps qu’il ait été, voyageur et observateur des choses et des gens, on pourrait reprendre à propos de Pierre Silvain ce qu’il écrivait de Loti : « le monde qu’il décrit n’existe pas, c’est lui »2.
Contribution de Tristan Hordé (texte et photo)
Pierre Silvain dans Poezibao :
Bio-bibliographie, Julien Letrouvé, colporteur (note de T. Hordé), extraits 1, Assise devant la mer (par Chantal Tanet)