Celui-là à l’écoute de ce feu
dans chaque fibre du temps
A l’écoute
de ce fleuve où trébuchent les ombres
et s’écoule sans férir
dans le flot du dedans
Celui-là hanté par l’indicible semence
de tout ce qui est nous
de tout ce qui sera
Celui-là empoigné par le verbe
broyeur de mots
Brassé par l’océan sans parois
Celui-là cible de chair
fendu par le cri des victimes
dévoré par l’ortie
étreint par les lois
Celui-là en mille morts
Celui-là en mille cendres
Mais toujours restauré
Mais toujours renaissant
Celui-là le poète
Retournant ciel et gouffres
Etreignant la vie reçue
puis rendue sans raison
Poursuivant jusqu’au tréfonds
de la terre et des hommes
l’unité dérobée de leur nom.
(Andrée Chedid)