Encore une lubie improvisée de Nicolas Sarkozy et comme d’hab, il faut qu’elle soit appliquée immédia-tement – donc dans l’impréparation la plus totale – et selon ses vœux : à charge pour Bercy de la mettre en musique…
“Démerdez-vous” ! guère étonnant qu’ensuite cela donne lieu à un étrange mais coutumier festival de COUAC ! COUAC ! bien sonores.
Si encore celui qui se prétend chef d’orchestre connaissait le solfège et l’orchestration… Même pas !
Il joue faux et conduit de même, contre les indications notées en marge de la partition par le compositeur mais ne pouvant ni ne voulant changer de registre, il se contente de donner des coups de sa baguette sur les doigts des interprètes qui renâclent devant l’obstacle. Utilisant parfois le second violon, un certain Claude Guéant, doué d’à peu près autant de doigté qu’un manchot ! qu’il charge de chapitrer les récalcitrants et leur tordre les bras pour les faire jouer comme il le souhaite… Cela va un temps et parodiant Bourvil dans le «Corniaud» devant sa 2 CV disloquée : «Forcément, ils vont beaucoup moins bien jouer, maintenant !»…
Et surtout, manque de pot ! ce sont les ténors et les solistes qui mènent la charge. Alain Juppé s’était lancé le premier et n’avait guère fait dans la dentelle. Depuis, il a mis quelque peu la sourdine, on a dû lui faire comprendre qu’il était allé un peu trop loin. Encore qu’il m’étonnerait qu’il soit sensible aux remontrances d’un Guéant ou autres seconds couteaux de la même eau.
Xavier Bertrand pourra bien pisser dans le violon autant qu’il le voudra. Alain Juppé le dira sans doute moins fort et crûment mais n’en pensera pas moins : la suppression de la taxe professionnelle – compensée uniquement la première année ! – coûtera bonbon aux collectivités locales..
Mais le clou, c’est incontestablement Jean-Pierre Raffarin… Lui, qui jusqu’il y à peu ne tarissait pas d’éloges sur les réformes voulues par le «Grand timonier», y compris celle des institutions territoriales – indispensable ! allant jusqu’à dire, raffarinade entre toutes… qu’il «fallait oser la réforme permanente» - semble de moins en moins disposé à avaler toutes les couleuvres multicolores – des vertes et des pas mûres – que les Sarko et autres Xavier Bertrand ou Guéant souhaiteraient lui faire ingurgiter dès le petit-dej : ce qui le rend dyspeptique en diable ! Et donc atrabilaire.
Il tonne contre la réforme des instances locales : Conseils généraux et régionaux qui devraient fusionner. Pensez donc : 3000 élus sur 6000 qui perdraient leur mandat ! voilà bien de quoi fâcher grave un sénateur qui doit précisément son élection aux «grands électeurs» : représentants des conseils municipaux, des élus au Conseil général et régional, avec une surreprésentaton des villages et gros bourgs due au découpage des cantons. L’heure est vraiment grave pour que Raffarin en appelle à sauver la décentralisation !
Il ne s’arrête pas en si bon chemin… D’où la fronde des sénateurs UMP… Le Figaro a ensuite édulcoré le titre en «Bercy veut rassurer les sénateurs»… Mais le problème reste entier même si «Le ministère de l’Economie sera «à (l’)écoute des vingt-quatre membres du groupe UMP (du Sénat) emmenés par Jean-Pierre Raffarin qui ont annoncé qu’ils ne voteraient pas la réforme - la suppression de la taxe professionnelle - en l’état».
Comme la plupart des élus locaux, il mesure l’impact négatif qu’aurait la suppression de la taxe professionnelle sur les finances des collectivités territoriales et le basculement sur un financement largement prélevé dans la poche des contribuables… Beaucoup de manque à gagner pour les budgets et l’on trouve mieux comme argument électoral à quelques encablures des régionales, sans oublier les prochaines cantonales…
En mars 2011 pour les cantons renouvelés en 2004. A un an de la prochaine présidentielle - qui ne semble plus une simple formalité pour le candidat (?) Sarkozy – un échec serait une bonne baffe, prélude à un éventuelle déroute en 2012.
C’est bien d’une Fronde qu’il s’agit !
Ne pas oublier qu’historiquement La Fronde (1648-1653) connut diverses phases et fit chanceler le pouvoir précisément par la rencontre de la colère des parlementaires du puissant Parlement de Paris - qui perdaient leurs anciennes prérogatives en même temps que leurs intérêts financiers étaient menacés - et l’irritation croissante du peuple, acculé à la fois par une grave crise de subsistances et des mesures fiscales jugées insupportables… Déjà !
Il faut lire les «mémoires du Cardinal de Retz», Paul de Gondi, alors coadjuteur de l’archevêque de Paris (et oncle de Madame de Sévigné) qui joua un grand rôle dans le soulèvement des parlementaires et du peuple. Moins toutefois que le Duc de Beaufort – petit-fils d’Henri IV et de Gabrielle d’Estrée - que certains affublèrent du sobriquet de «Beaufort des halles» alors que pour la Cour, il fut le “Roi des Halles”… à cause de sa popularité dans le peuple de ce quartier de Paris.
La «Fronde des nobles» fut plus tardive mais tout autant sinon plus menaçante pour le pouvoir royal. Ils étaient menés notamment par Condé et Conti – tous deux «princes du sang» : parents du Roi de France – le duc Longueville, Beaufort et encore Retz qui joua souvent sur les deux tableaux entre les frondeurs et la Cour, réfugiée à Saint-Germain-en Laye. Ce qui ne l’empêcha pas d’être en disgrâce.
Le plus piquant dans cette histoire sera sans doute que circulèrent dans Paris et une partie de la France révoltée des libelles contre le Cardinal de Mazarin - premier ministre de la Régente Anne d’Autriche, véritablement honni par le peuple et les frondeurs - pamphlets que nous connaissons sous le terme de «mazarinades»…
Or les aimables et fort nombreuses stupidités proférées par un certain Raffarin, premier ministre de Jacques Chirac entre 2002 et 2005 furent vite appelées «raffarinades»… Mais cette fois, si «l’âne du Poitou» se déchaîne et rue dans les brancards, il oublie d’être stupide et de parler pour rien dire.