Au pays de l'Absurde, tout est trop beau, trop propre pour être vrai. Les citoyens vivent dans l'obligation permanente d'aimer leur prochain, le cerveau vidé de sa substance par des tubes éléctroluminescents fichés dans leur boîte crânienne. Ces tubes sont les autoroutes de l'information nouvelle génération. On les appelle information alors qu'il ne s'agit que d'état d'être sans réelle conscience.
La conscience a depuis longtemps disparu au pays d'Absurde.
C'est un pays affligeant où les individus perdent leur identité car ils se sont perdus eux-mêmes sur une aire d'autoroute désaffectée, le crâne ouvert et les plaies saillantes leur lobotomisant l'âme. Ils tournent en rond, refaisant et défaisant inlassablement le même écheveau, celui de leur vie. Et on les oblige à vivre avec le sourire en sus, sourire de Mona Lisa placardé sur tous les visages; le même sourire, un peu forcé mais pas trop quand même, le même complet gris et les chaussettes aussi.
Seuls les coeurs n'ont pas été dissous dans les entrailles gloutonnes d'horreur polie de la Grande-Théorie-de-l'Absurde. Le coeur que s'acharne à faire battre tous les citoyens du pays d'absurde. Beaucoup meurent de chagrin et quelques-uns survivent, véritables “Cri” de Münch, un cri de désespoir qui hurle à la toile “sortez-moi de là !”, mais ne résonne que le violon brisé de tous ces coeurs déchirés…