La Nouvelle de la Classe : Transmutés

Publié le 01 novembre 2009 par Diana
Nobuhiko Obayashi adapte avec La Nouvelle de la Classe / Tenkosei (1982) un livre écrit par Hisashi Yamanaka : Oregaaitsude Aitsugaorede. Le cinéaste japonais nous plonge dans l’univers de l’adolescence. Pour se faire, il s’emploie à mettre en scène une œuvre comique emprunt de fantastique.
Onomichi, une petite ville portuaire. Kazuo est un collégien qui se rêve réalisateur. Une nouvelle élève, Kazumi arrive dans sa classe. Cette dernière a vécu dans cette ville avant de déménager avec ses parents. Elle reconnaît en Kazuo un camarade lorsqu’ils étaient enfants et met au goût du jour des souvenirs qui irritent le jeune adolescent. Dès lors, Kazumi ne lâche plus Kazuo jusqu’à la fin des cours. En rentrant chez eux, ils arrivent en haut des marches d’un temple Shintô et chutent dans les escaliers. Lorsqu’ils reprennent conscience l’esprit de Kazuo se retrouve dans le corps de Kazumi et l’esprit de cette dernière dans le corps de Kazuo. Ils doivent, non sans mal faire face à cette nouvelle situation…
La Nouvelle de la Classe connue également sous les titres anglais : Exchange Students, I are You, You am Me et Transfer Students est une sympathique immersion dans l’adolescence au travers de ces deux personnages qui deviennent l’un et l’autre. Le garçon la fille et la fille le garçon. Ainsi, Nobuhiko Obayashi pause les questions simples de l’adolescent et de son rapport au corps qui mute pour devenir adulte mais également et surtout la place d’un jeune homme et d’une jeune femme dans la société. Ici, le cinéaste s’applique avec un humour à nous montrer par des comiques de situations cette crise identitaire qui apporte son lot de sourire. Finalement le film traite de ce passage obligé vers l’âge adulte que nous avons tous connus ou connaîtront et de la palette de sentiments qui en découle. D’une certaine manière voir ce film avec un certain recul apporte sa part de nostalgie sur nos jeunes années collégiennes.
Cette œuvre légère et simple est un divertissement de qualité qui traite admirablement de l’adolescence et de ses aléas. On y voit deux personnages (mais avant tout deux sublimes acteurs) qui doivent affronter leur changement physique et tout ce que cela peut entraîner psychologiquement. Le changement de corps était déjà un choc en soit mais la découverte d’un corps du sexe opposé l’est encore plus, entre première érection pour l’une/l’un et les premières règles pour l’un/l’une. Nobuhiko Obayashi pointe également l’objectif de sa caméra sur le rôle d’un homme et d’une femme dans la société, ce que l’on attend de chacun d’eux notamment sur l’image donnée aux autres. Intéressant donc avec l’éternel rengaine qui dit qu’un garçon doit être comme ça et une fille comme ci. Le film sait fustiger les règles établies. Ainsi que se soit sur le rapport que l’on a avec son corps et la place que tient un individu par rapport à son sexe en société, La Nouvelle de la Classe réussit à transmettre les sentiments vécus et véridiques entre les doutes, les joies et les tristesses.
Ces sentiments véritables, on le doit à un scénario et à une mise en scène qui savent être efficace et subtile quant aux sujets traités. Surtout les interprétations prépondérantes pleines de vitalité des deux jeunes acteurs rendent le tout attrayant. Satomi Kobayashi (Kazumi) et Toshinori Omi (Kazuo) sont formidables et bluffants. Il est difficile de trouver quelque chose à redire sur leurs prestations à l’écran. Ils parviennent à communiquer à la fois les interrogations et les peurs de leurs personnages mais aussi une désinvolture dans leur nouvelle situation, où les acteurs parviennent à percer les secrets du sexe opposé pour donner le meilleur d’eux-mêmes. Surprenant de qualité. D’autant qu’ils sont bien épaulés puisqu’on voit passer dans ce long métrage Jo Shishido (Détective Bureau 2-3, 1963) ou encore Kirin Kiki (Still Walking, 2008), rien que ça. La part belle étant tout de même donnée aux adolescents.
La Nouvelle de la Classe est une réussite de bout en bout. Une comédie qui sait divertir et interpeller. La fin du film est superbement mise en scène avec Kazuo qui tient sa caméra et filme Kazumi dans une séparation forte en émotion. Des images superbes orchestrées par des aux revoirs pour un(e) ami(e) et un corps ami qui s’éloignent… un au revoir à une expérience unique qui changeront à jamais leur regard sur le sexe opposé, un regard rempli de respect mutuel et d’humilité.
I.D.