Immense succès londonien de ces dernières années, l'adaptation du film à suspense d'Alfred Hitchcock , "Les 39 Marches", est présenté depuis le début du mois au Théâtre La Bruyère dans une mise en scène intelligente, vive et maligne d'Eric Métayer.
Sur le ton de la comédie, de la parodie de film noir, les quatre comédiens interprètent plus de 150 personnages, tous impeccablement campés, passant de l'un à l'autre en un quart de seconde (en changeant simplement de chapeau ou de perruque) et aussi rapidement d'un lieu à l'autre, utilisant à merveille les artifices d'illusion primaires du Théâtre (un drap qu'on agite pour symboliser le fleuve, un simple cadre pour la fenêtre, une porte sur roulettes... Bref, on ne s'encombre pas avec un décor lourd et inutile, tout cela est fluide, rapide, drôle, et toute l'équipe mouille sa chemise durant 1h45 pour le plaisir du spectateur.
Pour le plaisir du spectateur, oui, mais pas pour son plus grand plaisir...
Car il manque un élément essentiel à ce spectacle pour que cela donne un grand spectacle : rien de moins que la matière première. A savoir une histoire et des situations fortes, un véritable texte, des dialogues un peu plus efficaces et développés. En effet, peu de répliques font mouche, pas de longue scène permettant à l'histoire de s'installer, aux personnages d'exister, pas de montée dramatique, pas de point d'orgue, tout est terriblement linéaire et ne tient que grâce au brio des comédiens. On se rend compte ici de l'importance de l'oeil du réalisateur pour donner une épaisseur à un scénario tenant sur une ligne. Au cinéma, cela passe comme une lettre à la poste, au théâtre le public reste sur sa faim. On se fiche totalement de l'histoire, de son issue et l'on arrive, par moments, à voir poindre l'ennui... C'est réellement regrettable car on a sincèrement envie de s'enthousiasmer.
Nous n'irons cependant pas jusqu'à dire qu'avec cette production le Théâtre La Bruyère à loupé une marche, car le travail est de qualité.
A voir pour les comédiens.