S’inscrivant dans la lignée du programme CPI (Création d’un Produit Innovant), et préfigurant la création d’un Observatoire de l’Innovation, le comité d’experts de l’innovation a vu le jour en janvier 2009. Quelle est sa mission ? Quels sont ses objectifs ? Quelle posture entend-il revêtir ? Nicolas Pasquet, fondateur et responsable dudit comité, s’exprime sur ces différents points.
Qu’est-ce qu’un comité d’experts de l’innovation ?
Il faut entendre par comité d’experts de l’innovation, un collège de personnalités, issues du monde de l’entreprise, mais également de la sphère académique, qui de par leur grande connaissance des arcanes de l’innovation, se réunissent périodiquement pour co-construire une vision originale et actuelle de ce que sous-entend l’innovation.
Beaucoup d’écrits sur l’innovation existent. Encore plus importants sont les emplois du mot innovation. Difficile, dans cette foire aux mots, de s’y repérer. Pour autant, le programme CPI est porteur d’un message fort sur l’innovation. Le comité d’experts amplifie ce message, et espère lui donner plus d’épaisseur, de lisibilité et de résonance. C’est aussi pour cette raison, que nous avons bâti un comité transdisciplinaire. Y siègent des experts de disciplines et d’intérêts très divers : le management, le marketing, le droit, la sociologie, le design, les tendances, la prospective, sont représentés.
Autant de perspectives qui nous permettent d’observer et de discuter l’ « objet » innovation en adoptant des angles de vue différents. La richesse et l’entrecroisement fertilisant des regards étaient un impératif. Car l’innovation est empreinte de multiples dimensions enchevêtrées que nous ne devons pas omettre. Penser système. Appréhender la complexité. Donner du sens. Cette volonté se rapproche de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui le Design Thinking.
Quelles sont ses ambitions et missions ?
L’ambition du comité d’experts de l’innovation est résolument de contribuer à enrichir les connaissances en matière d’innovation, en s’appuyant, tout particulièrement aujourd’hui, sur les projets menés dans le cadre du programme Création d’un Produit Innovant. Notre ambition est de donner une vision de ce que peut être l’innovation en dehors des champs de la technologie. Ce comité se veut un lieu d’échange et de réflexion transdisciplinaire. Il se pense comme un réservoir de pensée ouvert et critique. Il véhicule des manières de voir et de penser en liens avec notre actualité.
Ses missions relayent cette ambition. Principalement, elles recouvrent une forte volonté de produire des connaissances actionnables, et pour les entreprises, et pour les équipes projets d’étudiants qui constituent les ressources actives du dispositif CPI. Ce que nous recherchons en définitive, c’est d’être source de propositions en matière de dispositifs de lecture et d’interrogation des processus d’innovation à l’œuvre, et dans les entreprises, et dans les projets CPI.
Rappelons que ce comité d’experts de l’innovation préfigure le développement d’un Observatoire de l’Innovation dont le champ d’action sera plus grand encore.
Quels sont ses objectifs ?
La première année d’exercice (de janvier à juin 2009) s’est résumée en la construction d’une vision partagée. Nous avons conçu notre cadre de référence, c’est-à-dire ce que nous avons appelé notre posture, sur laquelle je reviendrai ultérieurement. Cette étape fut essentielle. Et nous voyons depuis notre retour aux affaires, en septembre dernier, à quel point nous pouvons, avec ambition, construire à présent.
Depuis septembre, nous avons ouvert et investi notre premier grand chantier : l’observation in situ des processus d’innovation. Nous disposons, grâce au programme CPI, d’un formidable vivier de matériaux exploitables : une douzaine d’équipes d’étudiants, autant d’entreprises, des tuteurs, des référents scientifiques, business, design, une équipe pédagogique constituée de professeurs de l’Ecole Centrale Paris, de l’ESSEC, de Strate College, d’entrepreneurs….Cela constitue un champ d’étude unique en son genre d’une richesse inestimable.
Nous avons donc entrepris d’imaginer et de déployer une méthodologie qui nous permette de suivre in situ et in vivo les étudiants en train d’innover. Sans oublier les entreprises clientes que nous interrogerons périodiquement. Il nous faut comprendre, en observant, ce qui fait qu’un individu, puis une équipe, parviennent à innover. Il y a certes des conditions structurelles qui peuvent les y conduire. Une méthode qu’ils se doivent de suivre. Mais la réussite d’un processus d’innovation ne se résume pas qu’au strict suivi de règles et de procédures. Il y a comme une magie qui s’opère. Il y a de l’extraordinaire. Certains diraient même, une certaine alchimie… de l’innovation. En somme, il nous faut mieux saisir comment des individus, unis par le même projet, parviennent à s’imprégner de ce qu’ils apprennent, à se l’approprier et réussir alors le grand saut. Changer de paradigme. Sortir du cadre. S’ouvrir au dehors. Nous sommes en prise avec une véritable problématique du passage.
Nous entendons aussi cette année valoriser et diffuser les connaissances que nous élaborons au fil de nos rencontres. Nous souhaitons publier. Nous désirons également renforcer l’efficacité des processus du dispositif CPI, lesquels produisent déjà de très bons résultats.
Quelle est donc cette posture ?
Le comité d’experts de l’innovation est porteur de perspectives différentes sur l’innovation. Chaque membre, lors de nos premières réunions, portait un regard bien spécifique sur l’innovation. Ces différences, que nous souhaitons maintenir, existent encore, pour le bien de nos réflexions. Néanmoins, nous sommes parvenus à définir notre propre cadre de perception. Nous avons défini ce qu’innovation voulait dire, ce qu’elle impliquait, et ce qu’elle suggérait.
En quelques mots, nous entendons l’innovation comme étant un processus tourbillonnaire. L’innovation ne se résume pas à un produit ni à un service. Ce sont toutes les opérations et suites d’événements, de l’idée à sa commercialisation, qui font l’innovation.
Nous nous sommes dotés d’une définition assez large de l’innovation. L’innovation implique une transformation durable des comportements. Nous sommes donc plus proches d’une définition de l’innovation que l’on nomme radicale, qu’incrémentale. Nous avons souhaité nous écarter, par la même occasion, de considérations trop souvent économiques, pour nous ouvrir bien plus à ce qui caractérise le mieux l’innovation : le changement.
Surtout, l’innovation se doit d’être étudiée à travers ses usages. L’important, ce n’est pas ce qu’un produit ou un service permet de faire, mais ce qu’un individu en fait. Aussi, l’attention est à porter prioritairement sur les modalités d’action et les pratiques qu’un usager entretient avec un objet. La technologie, tout en étant un élément déterminant dans la réussite fonctionnelle d’un produit ou service, ne constitue pas le cœur de notre approche.
Enfin, et ce n’est pas l’une des moindres caractéristiques de l’innovation, elle est porteuse de sens. Elle s’inscrit dans une stratégie, et vise à satisfaire des attentes déjà ou non encore exprimées. Ainsi, importe-t-il de donner du sens avant de donner du signe. En ce sens, l’innovation est une composante essentielle dans la capacité des entreprises à se questionner sur leur devenir.
Cette posture fut le fruit d’échanges merveilleux avec l’ensemble des membres du comité d’experts de l’innovation que je remercie ici vivement. De nombreuses réflexions sont en cours, dont une essentielle, sur la pertinence de l’innovation, que je livrerai très prochainement.
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