— Popée l'Aphérèse, & Co —
notes diffractées de Barbares, trois poèmes ("Popée", "Chant du bouc", "Éloge du maître") de Pierre Vinclair. Flammarion, 2009.
Fait inhabituel et hautement révélateur, on pourrait facilement raconter Barbares.
Je ne le ferai bien sûr pas, laissant chacun trouver ses prises parmi les nombreuses déviations, inversions, retournements et autres clinamens dont procède en partie le livre :
Alors
Les yeux lâchèrent
Le monde
[...]
Il reprend et baisse des yeux que l'on crut morts
Du suspens, et des "métaformoses"....
Popée l'Aphérèse (d'autres sont bien éphésiens), donc, "clochard de l'Être", pochtron pour diluer l'ingestion du chemin qui passe mal, se perd — sans écho ni réflexion — dans les éclats de sa (même pas dive) bouteille brisée.
- Tu racontes, là. Tu racontes....
Popée est post- : après la fin du monde ancien (& du vieux moule fatigué).
Donc paumé (en vacance on picole pour contrebalancer les déséquilibres) :
Un funambule, prêt à se faire ravaler par une réalité sans haut ni bas
(Popée, soit dit en passant, aurait presqu'un petit air d'Achab-malgré-lui ; Achab, vous savez, le héros moderne, Achab qui reprend son doublon.
Ô mes frères
saurez-vous dire que
nous avancions ensemble
Ou Achab upside-down (vers Ulysse?).
Le résultat est le même : ça saigne.
Vinclair, lui, sait bien qu'Achab n'est plus. Par contre, il y a sa compatriote AKA :
alors AKA fut
le délire d'un Nouveau Monde
disparu, —
AKA, prise en une chasse ardente par le sanglier.
*
Vinclair, anatomiste, dis-sèque l'epos. Il soumet Popée à l'ablation de l'initiale. Mais comme le professeur Vinclair a la main sûre et précise, et comme en telle matière il n'y a que des coutures (du nerf, quoi), l'opération paradoxale donne forme à un bien vif "Popée", montage d'une pièce musicale pour deux danseurs, un choeur (ou une meute) et un soliste hors pair, le sanglier, pour le climax. (YHVH est crédité au générique en tant que souffleur).
Popée" — une musique (cantus firmus et contrepoints), une danse, et un chant : noués, éclatés.
- Tu as raconté, tu as raconté... Tant pis pour toi. On te coupe illico la glose.
Contribution de Julien Ségura
Pierre Vinclair, Barbares, Flammarion, 2009, 167 p. 17 €.