Ca commence par recadrer le pourquoi du succès de Sloteridjk le nébuleux : "La popularité de l'essayisme philosophique de Peter Sloterdijk a, depuis le début, partie liée avec la montée en puissance d'un milieu social qui professe pour tous les phénomènes relevant de l'Etat-providence capitaliste le plus grand mépris, sans proposer pour autant la moindre alternative."
Et ça finit par un constat désabusé, où Honneth commente la proposition de Sloterdijk d'une "grève de l'impôt" :
"En définissant l'Etat-providence comme une "kleptocratie", Sloterdijk en est arrivé à un moment de son parcours où il se croit autorisé à prodiguer des conseils politiques. Dès lors que l'Etat-providence, simple instrument au service de la rancoeur des classes inférieures, extorque aux "couches productives" toujours plus de recettes fiscales, le temps serait donc venu d'exiger que les élites exploitées surmontent leur altruisme. Que commence la "guerre civile antifiscale", afin que celles-ci retrouvent le chemin de la fierté et les délices de l'estime de soi.
Cette légèreté à couper le souffle peut paraître risible. Mais ce serait oublier que celui qui la profère est la coqueluche des médias, enfant chéri des politiques, ainsi qu'un intellectuel paré des plus hautes distinctions académiques. Du coup, il peut y en avoir quelques-uns à qui viendrait l'idée de se demander si notre culture démocratique n'aurait pas atteint un degré de déréliction et de superficialité tel qu'elle en vient à renoncer à ses propres exigences."
Sloterdijk arrive à point nommer pour donner une philosophie à cette frange de personnes qui se veulent de gauche, ont enterré la social-démocratie avec le
communisme, et cherchent désespérément de nouveaux alcools. Les verts par exemple pourraient fort bien faire de Sloterdijk un de leurs penseurs : arrêtons de nos soucier des geignards pour nous
occuper du Co2 et autres choses plus importantes pour l'avenir de la planète. Les verts pourraient ainsi se débarasser du souci de toute pensée sociale, celle qui encombre tout le monde
aujourd'hui.
Ils ne se rendent pas bien compte que sous couvert de nouveauté et d'emballage conceptuel new look, ils se feront refiler les banalités les plus plates de la pensée ultra-individualiste des années 50 (l'hymne à l'entrepreneur créateur d'Ayn Rand) mélangées au credo anti-fiscal du libéralisme reaganien.