L’Ordonnance parait claire sur le problème de la publicité/promotion par et/ou en faveur d’un laboratoire de biologie médicale : elle est purement et simplement interdite, comme le SJBM le requérait.
Seules sont à ce stade autorisées les indications relatives à l’existence et à la localisation du laboratoire de biologie médicale publiées au moment de l’ouverture (encore faudrait il préciser les moyens et délais de cette publication…) ainsi que la mention de son accréditation.
Ce qui suit est plus inquiétant : « L’information scientifique auprès du corps médical et pharmaceutique ne sont pas de la publicité ».
Qu’est ce que l’information scientifique ?
Prenons un exemple et rendons nous aux entretiens de Bichat où s’est déroulé en septembre une formation d’une semaine pour nos blouses blanches nationales. Au programme d’une demie journée, une table ronde d’information scientifique (le terme est laché !) sur les bienfaits des boissons lights, organisé par une célèbre marque que nous ne citerons pas. A la tribune, 2 scientifiques chercheurs font l’éloge des boissons édulcorés dans le contrôle pondéral et la gestion de l’appétit. Le lendemain, tous les journaux féminins reprennent cette conclusion. « Les édulcorants sont inoffensifs et recommandées pour les régimes ». Ce qui n’est pas dit, c’est que les deux scientifiques invités sont rémunérés directement respectivement par un des plus grands fabricants d’édulcorants du monde et par un non moins célèbre fast food. Ce qui laisse comme un arrière gout de conflit d’intérêt dans la bouche.
Cet exemple pour illustrer que l’information scientifique est un terme très vague, ne recouvrant souvent aucune vérité ni réalité scientifique. En médecine, des groupes d’experts ont la lourde responsabilité d’élaborer des guides de bonne pratique, des référentiels opposables, des recommandations à l’usage des prescripteurs. Et ceci prend toute sa dimension lorsque c’est la solidarité nationale à travers la Sécurité Sociale qui doit financer les dérapages de prescriptions secondaires à une information scientifique peu rigoureuse.
En pratique, cette « information scientifique » ressemble pour le moment à des fiches d’aide à l’interprétation des principales analyses, assorties de références à des publications de portée internationales, sorte de mémento à l’usage de médecins féru d’assistance en ligne.
Hormis le fait que l’on peut déplorer que le tout numérique se substitue subrepticement à la formation continue des médecins ainsi qu’à la relation clinico-biologique, ce procédé pose aussi un problème légal.
Est il légal d’autoriser la promotion de cet outil d’aide à la prescription et à l’interprétation auprès des médecins prescripteurs ? Cela ne constituerait il pas une publicité détournée aboutissant à la captation d’une patientèle pour les laboratoires, les médecins invitant leurs patients à se rendre dans les labos de ces réseaux pour continuer de bénéficier de leurs services ? Ne risquons nous pas d’encourager les prescriptions trop fréquentes ou inutiles par le biais de cette information scientifique, que l’on sait d’avance peu altruiste ? A l’instar des visiteurs médicaux, dont le mode d’exercice a été très encadré afin de ne pas influer sur la délivrance de médicaments, l’indépendance des professionnels de santé en matière de prescription d’examens complémentaires nécessite d’être extrêmement vigilant.
Le SJBM demande l’interdiction des visiteurs médicaux dans le domaine de la biologie médicale, dans la mesure où il est impossible de vérifier la neutralité de l’information médicale délivrée, les prescripteurs ayant en outre accès à de multiples autres sources d’information professionnelle. Toute information scientifique délivrée par d’autres moyens aux prescripteurs devra avoir fait l’objet de publications médicales validées par la communauté scientifique et sans que cette information constitue une promotion en faveur d’un laboratoire.
Le Code de Déontologie (articles 19, 20, 26, 80, 81 et 82) relatif à l’exercice de la médecine et à son caractère non commercial définit très précisément le cadre réglementaire autorisé dans ce qui relève de l’information et de la promotion en matière de santé.
La biologie médicale doit se donner les moyens de faire de même, dans le cadre de la future loi la régissant.