Alors que je découvrirai demain soir le film à l’avant-première des Halles (en présence de l’équipe, les photos très bientôt), voici le petit compte rendu de la rencontre avec Jean-Pierre Jeunet qui s’était tenue dans les locaux de la Warner le 3 juillet dernier. Et oui, comme on dit, ça date un peu mais j’attendais la sortie du film pour en parler, ce qui me semblait plus judicieux. Notez qu’entre temps, Allociné a mis en ligne l’intégralité de cette Master Class en vidéo, pratique donc pour les personnes intéressées.
Il s'agissait de la seconde rencontre avec Jeunet, puisqu'en effet, j'avais déjà pu assister à sa superbe Master Class au salon du cinéma en ce début d'année. Mais ne boudons pas notre plaisir car chaque explication, chaque anecdote sur sa carrière ou ses projets s'écoutent comme un livre raconté.
Cette Master Class avait aussi pour elle d'être la première rediffusion live sur Allociné. Les internautes qui suivaient la rencontre devant leur ordinateur pouvaient donc poser leurs questions à Jean-Pierre Jeunet en temps réel.
Si lors de la rencontre il restait quelques mois seulement avant la sortie de son nouveau film, Micmacs à tire-larigot, le réalisateur des déjà classiques "le fabuleux destin d'Amélie Poulain", "un long dimanche de fiançailles" ou du quatrième volet de la saga Alien pour ne citer qu'eux a donc principalement évoqué sa nouvelle création.
Synopsis de Micmacs à tire-larigot :
Une mine qui explose au coeur du désert marocain et, des années plus tard, une balle perdue qui vient se loger dans son cerveau... Bazil n'a pas beaucoup de chance avec les armes. La première l'a rendu orphelin, la deuxième peut le faire mourir subitement à tout instant.
A sa sortie de l'hôpital, Bazil se retrouve à la rue. Par chance, ce doux rêveur, à l'inspiration débordante, est recueilli par une bande de truculents chiffonniers aux aspirations et aux talents aussi divers qu'inattendus, vivant dans une véritable caverne d'Ali-Baba : Remington, Calculette, Fracasse, Placard, la Môme Caoutchouc, Petit Pierre et Tambouille.
Un jour, en passant devant deux bâtiments imposants, Bazil reconnaît le sigle des deux fabricants d'armes qui ont causé ses malheurs. Aidé par sa bande d'hurluberlus, il décide de se venger.
Seuls contre tous, petits malins contre grands industriels cyniques, nos chiffonniers rejouent, avec une imagination et une fantaisie dignes de Bibi Fricotin et de Buster Keaton, le combat de David et Goliath...
Nous avons eu la chance de découvrir 5 minutes du dit film, ces mêmes 5 minutes qui servent de matériel promotionnel à l'international pour le vendre. D'entrée, on est frappé par la ressemblance avec le Fabuleux Destin ou Delicatessen. Une sorte de résultat hybride à la fois dans le montage, l'esthétique globale et la photographie. Un délicieux mix augurant du meilleur et ne trompant personne sur la marchandise. Après tout, comme Jeunet le dit lui-même, il fait du Jeunet parce qu'il aime ça. Si les gens n'aiment pas/plus, tant pis, il ne changera pas.
Dany Boon qui incarne ici le personnage principal, Bazil, n'était à l'origine pas le premier choix. Le personnage avait été initialement écrit pour Jamel Debouze mais à deux mois du début du tournage, des raisons personnelles l'ont poussé à renoncer au film, laissant Jean-Pierre Jeunet sans acteur pour le rôle titre. Si le nom de Dany Boon trottait néanmoins déjà dans sa tête, il dû le convaincre de reprendre le personnage, ce dernier ayant en premier lieu refusé, jugeant le rôle justement "trop écrit pour Jamel". Le script fut donc légèrement adapté en raison de ce changement important, ce qui décala le début du tournage de quatre mois supplémentaires. Quatre mois qui furent au final une aubaine puisque pendant ce laps de temps, la maison Chanel confia à Jeunet la réalisation de sa nouvelle publicité/court-métrage, "Train de nuit".
Le fil rouge de la séance fut la présentation des différents spots teaser introduisant les personnages de l'histoire. A partir de cette trame de fond, nous avons pu suivre la construction du film et, par extension, la manière de faire de Jeunet. Ce qui ressort de prime abord, c'est le coté artisanal de la production. Même si les moyens déployés sur le tournage restent important, Jeunet avoue préférer qu'on dise de lui que c'est un faiseur de films plutôt qu'un réalisateur. La notion de contrôle sur le process de fabrication est extrêmement importante et aucun détail ne semble lui échapper. Finalement, l'intention est effectivement honorable mais le pari d'autant plus risqué car en cas d'échec, la seule personne à incriminer... ça sera lui.
Cette volonté de maîtrise de A à Z se traduit par quelques exemples -radicaux-. En outre, à quelques exceptions près, les improvisations ne font pas partie des règles du tournage à la Jeunet. Les improvisations sont réservées aux répétitions mais lors du shooting définitif, la scène, les cadrages, tout est millimétré. Son désir de tout créer, s'est également traduit par le refus d'endosser le rôle de réalisateur sur Harry Potter 5, déclarant que tout était déjà fait, qu'il n'y avait plus qu'à filmer. A titre personnel, je ne suis pas tout à fait d'accord puisque même si effectivement les bases des HP restent celles créées par Chris Columbus dans les deux premiers volets, la patte du réalisateur se fait incroyablement sentir dans les films suivants.
Sur le cinéma en général, il se dit un grand admirateur du travail des équipes de Pixar (qui ne l'est pas) et reconnait avoir eu la chance d'avoir pu donner dans leurs locaux également quelques conférences. Selon lui, trop de réalisateurs français quittent l'hexagone pour succomber aux paillettes d'Hollywood. Ceci étant, il convient que les investissements en terme de productions ne sont pas vraiment comparables, ce qui confère aux US ce coté attractif qu'il ne serait pas vraiment correct de remettre en question.
D'autres sujets ont été abordés durant cette Master Class mais je vous invite à consulter directement la vidéo qui permettra de savourer la diction si agréable du réalisateur français. Parmi les points levés, on retrouve la pré-production de "Life of Pi", projet avorté pour cause de budget trop gourmand, la création d'une histoire (avant même le scénario) avec son complice Guillaume Laurent, la création sonore aux studios de Besson, le recul vis à vis des projections tests etc etc. Bref, un condensé d'explications, d'anecdotes qu'il serait dommage de manquer.
A la fin de cette Master Class (où nous étions seulement une petite cinquantaine donc relativement intimiste), Jeunet est gentiment resté discuter avec les personnes qui le désiraient et dédicacer les DVD d'Amélie que, en tant que bons fans, nous avions pensé à ramener. Une petite surprise attendait les bloggers en quittant la salle, à savoir une affiche de Micmacs dédicacée ainsi qu'une clé USB contenant le matériel promotionnel (teasers, affiche, note d'intention). Un petit plus bien sympathique pour clore une rencontre passionnante.
Rendez-vous demain soir (j'espère) pour ma critique du film !
Sortie officielle française : 28 octobre 2009
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