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Ready To Die…

Publié le 20 octobre 2009 par Lifestylemagazine

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New York 1994. Non, ce n’est pas le titre d’un film de SF des années 80 réalisé par John Carpenter… Mais ça pourrait. Et le synopsis commencerait ainsi:

« Au cœur des bas fonds de la Grosse Pomme, entre prostituées et junkys, une poignée de rappeurs se bat dans la pénombre pour redorer le blason de leur ville, berceau du hip hop. En effet, depuis quelques temps, le rouleau compresseur Lowrider de la bande à Dr Dre écrase tout sur son passage. Alors que la suprématie de la West Coast semble sans limites, un homme au physique de Boudha, surmonté d’un béret, sort de l’ombre… Biggie Smalls aka The Notorious BIG. »

Le premier album de Notorious BIG, « Ready to die » sort donc dans le courant de 1994. Sans le savoir, le natif du quartier de Bedstuy à Brooklyn va écrire là le premier chapitre de sa légende. 15 ans, un biopic et des millions de T Shirt à son effigie écoulés plus tard, il est évidemment plus facile de mesurer l’impact du rappeur sur l’histoire du hip hop. Cet album, avec entre autres « Illmatic » de Nas ou « Enter the Wu Tang (36 Chambers) » du Wu Tang Clan, va marquer le renouveau du rap New-yorkais et de la cote Est en général.

samples notorious big ready to die 1994

Cru, brut mais aussi plus léger et grand public sous certains aspects, « Ready to die » va réussir à conquérir un vaste public. Des titres mainstream comme « Big Poppa », « Juicy » ou encore « One more chance » côtoient des morceaux plus sombres et hardcores tels que « Ready to die » ou « Suicidal Thoughts ». Ce brassage est en grande partie du à l’influence considérable de Puff Daddy, producteur exécutif du disque, sur Biggie. La suite de la carrière de Puff Daddy souligne d’ailleurs très bien le penchant prononcé du monsieur pour le strass et les paillettes. Toujours est-il que « Ready to die » va ainsi viser un plus grand auditoire, tout en conservant une certaine cohérence…

Malgré quelques titres plus enjoués, « Ready to die » est un disque sous tension. La voix de Biggie Smalls scotche l’auditeur et l’amène dans un univers de rue, pesant et paranoïaque. Le rappeur nous dépeint de son flow puissant et étouffé une vie en sursis, sans place pour les sentiments. La maitrise technique de Biggie est impressionnante, on a rarement ressenti une telle alchimie entre le beat et la voix. Naviguant en permanence entre constat et égo trip, à l’image du titre de l’album tout aussi profond que provocateur, le rappeur arrive toujours à installer un climat sulfureux, parfaitement aidé pour cela par des instrus de qualité. Au casting des beatmakers, on retrouve principalement Easy Mo’Bee ( un type qui a tout de même bossé avec Miles Davis, ça mérite le respect) mais aussi le monument DJ Premier pour «  Unbelievable » ou encore Lord Finesse pour « Suicidal Thoughts ». Le son est graveleux, crépitant, le groove est lourd et syncopé, le beat sec et efficace, les scratchs incisifs. L’album apparaît comme la quintessence du son New-Yorkais de la première moitié des 90’s: du funk tronçonné à la MPC. « Machine Gun Funk », « The What » en featuring avec un Method Man en grande forme ou l’insolite « Unbelievable » sont imparables. « Big Poppa » et son sample funky des Isley Brothers forment un hit impeccable pour les clubs. « Warning », « Ready to die » ou « Gimme the loot » sont des morceaux de bravoure gangsta, permettant à Notorious de nous faire apprécier son agilité lyricale et ses punchlines de haute volée.

En clôture de « Ready to die », le crépusculaire « Suicidal Thoughts » brille de toute sa noirceur, avec un Biggie sur le fil du rasoir prêt à mettre fin à ses jours, livrant dans un dernier souffle ses pensées suicidaires: « Crime after crime, from drugs to extortion/ I know my mother wished she got a fuckin’ abortion/ She don’t even love me like she did when I was younger/ Suckin’ on her chest just to stop my fuckin’ hunger/ I wonder if I died, would tears come to her eyes?/ Forgive me for my disrespect, forgive me for my lies ». Le disque s’arrête et l’on est bien loin de l’ego trip de façade de morceaux comme « Big Poppa ». Biggie flirte ici avec sa thématique préférée, la mort. Objet de fascination, envisagé comme un salut autant que comme une angoisse dans la bouche de Biggie, on retrouve en permanence le thème de la mort dans l’œuvre du rappeur, formant un parallèle étrange avec la trajectoire de l’homme, assassiné en 1997. Biggie est aujourd’hui parti, « Ready to die » restant comme le seul album sorti de son vivant et une pierre angulaire de la musique hip hop. La reconnaissance est aujourd’hui totale pour cet ancien dealer de crack au physique ingrat. Comme il le chantait peu de temps avant sa mort: « You’re nobody ’til somebody kills you ».



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