D’emblée, je ne suis guère sensible à la peinture de
Philippe Perrot; je pense que l’homme est sans doute très intéressant, et il a un réel talent pour trouver des titres littéraires et tourmentés à ses tableaux, mais sa peinture elle-même, dépouillée de ces para-textes, même si elle est renforcée au soufre et aux antiseptiques, ne me parle guère. J’ai du mal à voir en quoi le monde, l’art, l’histoire se trouvent enrichis par ce travail.
Damien Deroubaix, qui travaille sur une variété de supports, dont des panneaux de bois destinés à la xylographie, mais présentés tels quels et peints, très beaux, a sans doute plus de souffle, mais son obsession avec l’alchimie et le rock heavy metal interfèrent trop, à mon goût, avec la qualité formelle de ses pièces et la desservent en les tirant vers le thématique, voire un anecdotique qui ne m’attire guère (
World Downfall).
C’est entre les deux derniers que j’hésite.
Nicolas Moulin a le vrai talent de saisir l’architecture, les paysages désolés, urbains ou insulaires, et de créer un univers très particulier, uchronique et utopique, qui en fait, je crois, un véritable explorateur à la suite de qui nous découvrons de nouveaux univers avec des yeux neufs. La photo ci-contre fait partie de sa série
‘Vider Paris’, où la ville est bétonnée et désertée.
Saâdane Afif, lui, nous parle de processus, de création, de travail en chantier. Tout son travail est, plutôt qu’une réflexion du monde, une interrogation sur la création, seul ou, le plus souvent avec d’autres, musiciens, écrivains, graphistes. A la Cour Carrée, il ne présente qu’une affiche, laquelle renvoie à une performance ailleurs, elle-même transmutation musicale de son travail. Je n’ai pas vu ladite performance, hier soir, mais j’aime ce jeu d’écho, cette introspection (ci-contre, détail de
Tête de mort).
Au final, je voterais pour Saâdane Afif. On verra demain.
Les pièces montrées ci-dessus ne sont pas celles exposées à la Cour Carrée, mais elles m’ont semblé représentatives du travail de chaque artiste. Je précise que j’ai assisté, cet après-midi, à la présentation de chaque artiste faite par un commissaire indépendant devant le jury (mais bien sûr pas aux délibérations du jury, dont j’ignore la décision).