Aujourd'hui rendu de copies. Après renseignement auprès de mes collègues, je peux, ici, tenter une typologie des façons de rendre les copies corrigées et notées. Il y a donc plusieurs façons de rendre les copies d'un contrôle à des élèves. A chacune correspond un type de prof.
Il y a la façon sadique, celle en mode dégressif : on commence par les plus hautes notes pour terminer par les plus basses. La tête des élèves qui voyant la moyenne passer, alors que leur tour n'est pas encore arrivé, est un vrai bonheur m'a-t-on certifié. On trouve ce genre de numéro plutôt du côté des profs de maths, mais ce n'est pas une exclusivité des scientifiques car quelques profs de lettres s'y adonnent. Et avec autant de plaisir que les autres.
Il y a la variante, la façon sadique inversé, celle qui vient après que l'on se soit lassé de la méthode précédente mais pas de son aspect sadique ; cela consiste à inverser la position des copies : on commence par distribuer les copies les moins bien notées et on termine par les plus hautes. Cela met une excitation très forte, une joie qui se répand crescendo quelques minutes (on peut faire durer en commentant les copies, en faisant quelques remarques). Comme je l'ai dit, cette méthode est pratiquée par ceux qui se sont lassés de la première méthode sadique (un peu comme si fatigué de la position du missionnaire on passerait à la position de levrette... Pardon pour l'analogie...) et qui ainsi, ouvre une nouvelle voie (?), si bien que les élèves se demanderont avant que la distribution ne commence (un peu comme madame qui se demande comment monsieur est luné ce soir...ou inversement, quelle position madame va imposer à monsieur aujourd'hui...), qui se demandent donc (les élèves) si le prof va, cette fois-ci, faire le sadique dégressif ou progressif... Évidemment on peut jouer aussi le désordre ce qui introduit un troisième variante mais ceci n'est guère envisagé, en général, par nos sadiques. De l'ordre, rien que de l'ordre, n'importe quel ordre mais de l'ordre !!
Il y a la façon menfoutiste. Je me fous de rendre les copies dans un ordre quelconque, l'important c'est de les rendre (J'te les prends comme ça vient, là comme ça !). Oui, mais souvent nos profs menfoutistes sont ceux qui vont commenter les copies : "Ah et puis mademoiselle/monsieur X qui, une fois de plus, nous fait le coup de... etc." Parce que rendre les copies dans le silence alors qu'aucun ordre ne préside à la distribution c'est un peu court ou plutôt non, ça fait longueur, alors on est tenté d'agrémenter. Remarquez, les sadiques peuvent aussi ajouter cet élément salé à leur rendu de copies, mais en général ça casse l'aspect suspense de l'acte, le silence s'impose donc, dans ce cas-ci, du moins en général...
Il y a enfin la façon neutre : on rend les copies par ordre alphabétique. Sans imagination, un peu besogneux (le cheminement raisonnable et sans accident, les mêmes démarrages, les mêmes arrêts aux mêmes endroits... C'est la façon que j'ai choisie... Je sais... Je sais...) mais voilà ça demande de classer les copies, alors quelle fatigue... Si en plus il faut classer après s'être fait chier donné du mal à corriger, alors là non !
Maintenant, il s'agit d'introduire quelque chose d'important qui s'applique à chacune des façons citées précédemment : faut-il annoncer les notes quand on rend la copie ou faire silence ? Les élèves (je leur ai demandé) préfèrent le silence. La note, pour eux, tient de la sphère privée, surtout quand elle est mauvaise. Les profs préfèrent annoncer à voix haute le résultat. C'est vrai qu'il est difficile de rester muet quand on leur a mis... une bonne note ou même une mauvaise... Et puis c'est l'un des seuls moments où pourrra s'exercer leur autorité. Ce qui n'empêchera pas par la suite les contestations. C'est bien pour cette raison que je parle de moment, comme une dernière précieuse parenthèse. Enlevez les notes et il ne restera rien que quelques points de suspension...