Les cinq personnages (plus un intrus de dernière minute, pour son quart d’heure de gloire) sont des sculptures; elles parlent, elles se déplacent sur scène, elles dansent. Chacune a sa personnalité, son style, son accent. L’homme qui marche, de Giacometti, marche sans répit, sombre et mélancolique. Elegy III, de Barbara Hepworth, Anglaise distinguée et fragile, est toute prête à confronter ses rondeurs aux angles de Quatre cubes, de Lewitt, qui théorise et pontifie, pendant que Sans titre (Granit) de Rückriem jure avec l’accent allemand, tempête, réclame une bière. Le lapin de Jeff Koons, surexcité et vibrionnant, donne son rythme à la pièce.
Ces sculptures habituées aux visiteurs de musée s’étonnent de l’audience passive du théâtre et profèrent au passage quelques “vérités”; on rit beaucoup, et on réfléchit agréablement. La version précédente, présentée tout aussi brièvement à Münster en 2007, avait un personnage de plus, le Berger des nuages de Jean Arp, et les dialogues se sont ici parisianisés, avec quelques références à Pompidou et à Lady Di.