J’annonçais il y a quelques jours avec mes collègues blogueurs, Laurent et Olivier, l’opportunité que nous offrait le Docteur Marie-Claude Monfrais-Pfauwadel de répondre à toutes nos questions pour cette JMB. Le Dr Monfrais-Pfauwadel a commencé à plancher et je vous propose de lire la réponse qu’elle apporte à cette première question :
Pour la rééducation du bégaiement, on entend souvent parler des orthophonistes mais plus rarement des phoniatres. Comment choisir de consulter l’un ou l’autre ? Quelles sont les différences en terme de prise en charge et de thérapie ?
Marie-Claude Monfrais-Pfauwadel :
Les phoniatres sont des médecins phoniatres. Les orthophonistes sont des auxiliaires médicaux qui réalisent des actes médicaux par délégation sur ordonnance. Le médecin phoniatre, en France, est spécialiste des pathologies de la communication : voix, parole langage et audition – et s’occupe aussi des problèmes de déglutition. Il est maintenant forcément ORL, mais que depuis quelques années. Il suivait auparavant un D_I_U de trois ans (en même temps que sa formation en ORL) comprenant des cours de pathologie, mais aussi de linguistique et de phonétique, de psychologie, de neuropsychologie etc., tout en faisant des stages auprès de confrères phoniatres, pédopsychiatres, neurologues etc.
Il existe en France presque 200 phoniatres. Les trois quarts font partie de la Société Française de Phoniatrie.
Tous les pays n’ont pas de phoniatres : il y en a peu dans les pays anglo-saxons, plus dans les pays latins et slaves. La médecine phoniatrique a pris son essor dans l’Europe de l’Est, à la fin du XIX siècle – mais le premier phoniatre fut le Dr Itard (incarné par François Truffaut dans « L’Enfant sauvage ») qui créa le premier institut pour les enfants sourds. Tous sont très passionnés ! Certains s’occupent de laryngectomisés, d’autres d’enfants sourds, de traumatisés crâniens, d’enfants polyhandicapés etc.
Le rôle du médecin phoniatre est de poser les diagnostics, d’évaluer et d’explorer les patients, d’élaborer les stratégies thérapeutiques, d’ordonner les traitements (dont la rééducation orthophonique est une des ressources), d’évaluer leur efficacité. Il est expert, il contrôle, il conseille, il enseigne et s’il lui reste du temps, il peut faire un peu de recherche clinique.
Qui peut le plus peut le moins : si nous ordonnons des rééducations, il faut que nous soyons capables de les prodiguer, voire de les mettre au point et de les enseigner. Là, c’est chacun selon ses goûts. Certains médecins phoniatres font surtout de la consultation, d’autres surtout de la médecine hospitalière ou de la recherche clinique. Beaucoup forment et enseignent, dans un esprit de compagnonnage.
Leur pratique relève donc de la Convention avec la Sécurité Sociale et les tarifs sont fixés par la CCAM pour les actes d’exploration. Pour les actes de rééducation, il y a entente préalable et la valeur de la lettre-clef est celle des orthophonistes (voilà à quoi mènent 10 années d’études !). Simplement il y a écrit sur la feuille KMO et non AMO.
En dehors de la rééducation, lors de sa prise en charge d’une pathologie (par exemple le bégaiement), le médecin phoniatre peut demander des examens complémentaires, les centraliser et les interpréter, prescrire des médicaments, évaluer les rééducations qu’il n’aura pas pratiqué lui-même, prescrire des rééducations, recevoir les familles, conseiller, délivrer des certificats (de tiers temps pour les examens par exemple), etc.
Pour être tout à fait clair et si je prêche pour ma paroisse, il vaut mieux voir un phoniatre d’abord… mais je suis réaliste et je sais qu’il y a peu de phoniatres, et pas assez intéressés par le bégaiement. En cas de doute ou de problème complexe, il est préférable de consulter le phoniatre avant tout s’il y en a un.