Vous avez remarqué que je n'ai pas posté de nouveaux billets sur ce blog depuis quelque temps. L'explication simple : ma femme a accouché il y a 2 semaines d'une petite fille prématurée (elle s'appelle Ania et c'est le plus beau bébé du monde), ce qui chamboule beaucoup de choses. L'explication longue : j'ai plusieurs billets en cours d'écriture, mais avec cette naissance je n'ai pas trouvé le temps de continuer leur rédaction.
Le monde hospitalier
Il n'empêche que la situation m'a fait remarquer certaines choses. La première, c'est que le personnel hospitalier est vraiment en sous-effectif. Quand une sage-femme vous explique qu'elle aurait dû terminer son service à 15h00, et que son mari ne va pas être content parce qu'elle reste jusqu'à 21h00 pour la troisième fois de la semaine, on relativise beaucoup ce que les informaticiens subissent en période de rush (je rappelle au passage que la plupart des informaticiens ont le statut de cadre et trouvent ça normal ; pensez-vous que les sage-femmes aient ce statut ?).
Ensuite, la rétention d'information est une vieille habitude qui est toujours bien vivace. Mais le plus étonnant, c'est que tout le monde ne la pratique pas. Pour être clair, tant que ma femme était hospitalisée et qu'elle subissait des examens, il était impossible d'avoir la moindre information. Qu'est-ce qui cloche exactement ? Pourquoi une nouvelle prise de sang, qu'est-ce qui a été trouvé dans la précédente ? Quels sont les risques ?
Chaque nouveau médecin n'apportait aucune information, à part le fait qu'il faille faire de nouveaux examens. Le top du top, c'est le soir où un médecin est venu, a pris une feuille de résultats, nous a dit "Je vais chercher les autres résultats et je reviens" ; 45 minutes après, une infirmière nous a rapporté la feuille de résultats, en nous disant que le médecin était parti.
Quand vous vous retrouvez à attraper des mots à la volée, au cours de discussions entre médecins et infirmières, puis que vous cherchez ces mots sur Internet, vous ne pouvez voir que le mauvais côté des choses...
D'un autre côté, à partir du moment où l'accouchement était déclenché, nous avons été en contact avec le personnel de néonatalité, qui a été exemplaire. Que ce soit les pédiatres ou les infirmières, ils nous ont très bien expliqué la situation et ce qui allait se passer, ils ont toujours pris le temps de répondre à nos questions, voire même de les devancer. Ils nous ont même donné les explications que nous n'avions pas eues durant les jours précédents.
C'est assez étonnant, non ? Est-ce que le fait d'être au contact de bébés prématurés et/ou malades développe l'empathie ? À moins que ce soit les personnes douées pour les relations humaines qui s'orientent vers la puériculture et la néonatalité ? Pourtant, j'imagine qu'il n'y a rien de plus fatigant, à la longue, que de nourrir et nettoyer des bébés, tout en prenant en charge les doutes et les interrogations des jeunes parents. Et pourtant, ils continuent à le faire tous les jours avec la même bonne humeur et le même amour visible des enfants.
Je ne sais pas si nous sommes particulièrement malchanceux, mais on a un peu eu l'impression de tomber sur des versions françaises du Docteur House. Des gens qui s'intéressent sûrement à la guérison de leurs malades, mais qui semblent s'y intéresser de manière théorique et qui ne semblent pas se préoccuper particulièrement des patients eux-mêmes. Comme s'ils étaient trop occupés pour prendre le temps de parler à leurs patients, qu'ils délèguent ça aux infirmières. Eh, expliquer les tenants et les aboutissants d'un traitement, ce n'est pas juste de la relation humaine ; cela fait partie du traitement.
La même chose, chez les geeks
Par ricochet, cela me fait penser à une discussion que j'ai eue hier midi. Je discutais avec quelqu'un travaillant dans une grosse maison d'édition, et il me racontait la manière dont leur directeur informatique refusait en bloc de faire certaines évolutions sur leur système d'information. Pourtant, il s'agissait d'évolutions absolument nécessaires au business de cet éditeur (pour pouvoir traiter des livres électroniques !), mais bizarrement même le PDG n'arrivait pas à obtenir ce développement.
Je m'étonnais à haute voix. Il existe des directeurs techniques qui ne comprennent pas qu'ils sont au service de leur entreprise, et non l'inverse ? Mais le plus étonnant, c'est que les personnes autour de la table, plus vieilles et expérimentées que moi pour la plupart, m'ont rétorqué que ce type de comportement est assez courant.
J'ai du mal à comprendre. Il est nécessaire qu'un chef de projet ou un directeur technique sache évaluer les demandes qui lui sont faites, propose des alternatives fonctionnelles pour diminuer les impacts techniques, arrive à définir les priorités de chaque projet. Mais de là à refuser en bloc des développements nécessaires...
C'est un comportement que j'ai déjà rencontré chez des administrateurs systèmes, qui deviennent tyranniques avec les utilisateurs des systèmes qu'ils administrent (“Ahah, je suis root, je suis l'égal de Dieu ! Si tu veux que je fasse ce que tu me demandes, il faut que tu sois gentil avec moi !”), alors que leur travail est justement de permettre à ces personnes de travailler dans de bonnes conditions.
En fait, en toute circonstance, il ne faut pas oublier qui est le client. Dans un hôpital, c'est le patient ; il faut le soigner, et l'information fait partie du traitement. Dans une entreprise, le fonctionnel est client de la technique ; la technique doit évaluer et conseiller, mais pas faire les choix fonctionnels.