Policiers algériens sous des jets de pierres lors d’une manifestation près d’Alger, le 20 octobre 2009.
ALGER — Les incidents qui ont opposé durant deux jours la police aux habitants d’une cité d’Alger qui réclamaient de meilleurs logements, s’inscrivent dans une contestation sociale sporadique qui touche régulièrement plusieurs villes du pays.
Lundi et mardi, des centaines de jeunes, soutenus par des femmes et des pères de familles de la cité populaire de Diar Echems, ont affronté les forces de l’ordre avec des pierres en les empêchant d’entrer dans ce bastion pauvre du quartier El Madania, situé sur une colline.
Ils protestaient contre les conditions d’attribution de logements sociaux et leur “mal vie” dans des logements exigus ou insalubres, alors que les autorités entendaient interdire la construction de baraques de fortune sur un terrain de football adjacent à la cité.
A quelques centaines de mètres cependant, dans une autre zone du quartier qui regroupe un centre administratif, des banques et des établissements publics ou privés, les commerces étaient normalement ouverts et la foule nombreuse.
L’attribution de logements sociaux provoque régulièrement des manifestations en Algérie. Les couples y ont une extrême difficulté à se loger en raison de la démographie qui a fait tripler sa population depuis l’indépendance en 1962, la portant à 35 millions d’habitants.
De leur côté, dans les environs de Ouargla, à 800 km au sud d’Alger, des habitants de la commune de Rouissat ont bloqué dimanche des routes avec des pierres et des pneus enflammés pour protester contre la dégradation de leur environnement par des grands travaux d’assainissement.
Des troubles étaient également signalés à Annaba, grande métropole de l’extrème Est algérien, à Tizi Ouzou en Kabylie, à 110 km à l’Est d’Alger, où à Boumerdès, à l’Est de la capitale.
Ces manifestations localisées traduisent l’exaspération des habitants face à des conditions de vie difficiles, en raison notamment de services publics jugés déficients: problèmes de logements, de voiries, de coupures électriques ou d’eau et de gaz, note régulièrement la presse algérienne.
Les jeunes en sont souvent les fers de lance: “les émeutes de ces dernières années sont l?oeuvre rageuse d?une jeunesse désemparée, lourdement frappée par le chômage, l?exclusion et le désespoir”, estime Mohamed Hachemaoui, spécialiste en sociologie politique et professeur d’Université, cité par le journal francophone El Watan.
Elles sont “le symptôme de la crise du politique: le régime politique génère l?émeute, expression extrême et violente de la +prise de parole+”, dit-il en soulignant le “clientélisme de l’Etat” et son manque de dialogue avec la population.
L’Etat refuse “l?institutionnalisation du conflit social, l?expression autonome des revendications et la représentation politique de la société selon les intérêts en conflit”, dit M. Hachemaoui.
En réponse à la contestation, les autorité algériennes mettent en avant les progrès réalisés ces cinq dernières années: un million de logements ont été construits ou sont en phase d’achèvement et plus d’un autre million est prévu jusqu’en 2014.
Le projet de loi de Finances pour 2010 prévoit aussi l’équivalent de 10 milliards d’euros pour la politique sociale de l’Etat, et la même somme pour “l’amélioration des conditions de vie de la population”: infrastructures de santé, de l’habitat et l’urbanisme, alimentation en eau, gaz et électricité, transports urbains.
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