Il y a quelques temps, une nouvelle réforme de la sécurité sociale a été adoptée afin d’ajouter une franchise médicale. Il s’agit d’ajouter 50 centimes d’euros sur les boites de médicament et sur les actes de consultation. Déjà, depuis 2005, 1 euro restait à la charge des patients sur les consultations. Chaque franchise est plafonnée à 50€ mais cela fait tout de même près de 100 € qui peuvent rester à la charge du malade. Bien sûr, on nous dit que les foyers plus démunis seront exonérés ainsi que les malades de longues durées.
Mais une fois de plus, c’est la méthode générale qui nous gène : on règle les déficits à coups de prélèvements supplémentaires (la méthode est appliquée par ailleurs). Or, on sait pertinemment que ce n’est qu’un pis-aller, et que le résultat ne changera pas fondamentalement. Chaque gouvernement nous promet un retour à l’équilibre mais depuis tant d’années, rien n’a été amélioré, on creuse de plus en plus le déficit. C’est comme quelqu’un qui rentre chez lui et trouve son appart’ inondé. Au lieu de colmater la fuite, il éponge (d’après une pensée de N. Hulot que on la trouve bien appropriée). On accuse aussi la fraude à la sécurité sociale, histoire de ne pas avoir à chercher des vraies solutions.
Mais ne serait-il pas plus judicieux de comprendre les raisons qui poussent les français à dépenser autant en frais de santé, à être aussi malades ? Ne devrait-on pas plutôt faire de la prévention au lieu de coller des rustines pour colmater les fuites des rustines précédentes ?
Oui, mais là, il semble qu’on touche un sujet sensible puisqu’on se met à chercher les causes du mal. On pense surtout aux laboratoires pharmaceutiques dont les médicaments coûtent de plus en plus chers pour justifier (paraît-il) le montant de leurs recherches. Parce que finalement, lorsque le déficit de la sécu. augmente, ce n’est pas aux laboratoires a qui on demande de baisser les prix, de rogner sur leurs marges, mais bien systématiquement aux citoyens d’accepter poliment de payer un peu plus… parce que le trou de la sécu grandit.
L’Etat de l’autre côté cesse de rembourser les médicaments qu’il juge les moins efficaces. OK, mais le choix des médicaments est-il le bon ? Ainsi on ne rembourse plus les vitamines depuis bien des années parce qu’il s’agit de médication de « confort ». C’est sans doute erroné puisque très souvent, l’automne approchant, votre généraliste vous prescrit ces dits médicaments de confort pour vous donner les forces nécessaires pour affronter l’hiver. Nous sommes incapables d’étayer nos arguments de manière chiffrée mais nous sommes vraiment persuadés qu’on pourrait éviter un grosse partie des frais liés aux rhumes, grippes et autres sinusites… si on faisait sa petite cure de vitamines chaque année ou deux fois par an. Un Homme qui n’a pas de carence tombe normalement moins malade, non ? Mais finalement, il vaut mieux soigner le mal que de le prévenir… mais c’est plus couteux. Cela dit, on n'est pas sûr que l’essentiel des dépenses se situe ici.
Nos modes de vie eux-mêmes sont de plus en plus dégradés. Entre la hausse de la concentration d’ozone liée à l’hyperactivité industrielle et automobile qui favorise les risques d’infarctus, les déséquilibres liés à la malbouffe (hypertension, fatigue, obésité…), les 100000 substances reconnues toxiques et commercialisées dans les pesticides, les additifs alimentaires, les produits d’entretien, les cosmétiques, les carburants… L’augmentation de 63% des cas de cancers entre 1980 et 2000 (dont la moitié, certe, est imputable à l’augmentation de la population, son vieillissement et l’amélioration du dépistage) a nécessairement un coût pour la sécurité sociale. Là encore, on peut reprendre le vieux proverbe qui dit que le malheur des uns fait le bonheur des autres. A tous les niveaux, des entreprises, des gens s’enrichissent sur le dos de notre santé et donc sur le dos de la sécurité sociale. Il va s’en dire que l’arrêt de ces pollutions et autres abus conduiraient à des économies remarquables mais bon, le profit et la croissance passent avant tout.
Au sein des entreprises, il y a des marges de manœuvre pour améliorer la santé. D’après une étude de 2004 sur les accidents du travail qu'on a trouvé sur le site du ministère du travail (lien), un problème de santé sur cinq est lié au travail. Mais sont-ils tous reconnus comme accident du travail ? Les entreprises payent-elles réellement le prix des maux qu’elles font subir à leurs employés ? Evidemment, la réponse est négative dans les deux cas. Mais là encore, la solution idéale n’est pas de faire payer les entreprises, mais d’améliorer les conditions des travailleurs. Entre le stress, les troubles physiques, les dépressions et dans le pire des cas, les suicides, liés à l’augmentation de la productivité, le manque de personnel, la pression de sa hiérarchie, de ses collègues... Les employés sont corvéables à merci et lorsqu’ils ne satisfont plus, on en change, pour un modèle plus récent, plus résistant. On nous maintient dans un état de crainte permanente, celle de perdre son emploi et de ne plus être capable d’assumer nos dettes pour notre voiture, notre maison, notre écran plat, notre dernier prêt qu’on doit refinancer parce qu’on ne boucle plus le mois… Il serait idiot de penser que cette crainte latente n’a aucun effet sur notre santé... "Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient frappés".
Bref, on pourrait sûrement allonger encore la liste des causes. Mais finalement, ce qu’on retient, c’est que l’ « exubérance irrationnelle » de bon nombre d’acteurs de l’économie de marché, à commencer par les actionnaires, sont responsables de la dégradation de l’environnement et de la santé de l’ensemble des citoyens pour maximiser leurs profits. Mais il serait incomplet de n'accuser que les entrepreneurs, les actionaires. Nous sommes également responsable de notre situation, nous devons nous responsabiliser au lieu de nous laisser guider et d'accuser les autres. Il faut aussi se sortir de la tête qu'on se licenciera nous-même si nous sommes de "mauvais consommateurs", y compris pour les dépenses de santé.