Je
ne connaissais pas Peter Klasen. Même pas de nom. Et bien heureusement
La rétrospective est super bien faite. Elle est classique par le fait qu’elle est réalisée dans l’ordre chronologique, mais l’agencement de l’espace est juste géniale et met super bien en évidence son travail et sa progression dans les différents thèmes.
D’inspiration très pop art (Ed Ruscha pour les couleurs, James Rosenquist pour l’esprit collage, Mel Ramos pour la relation au corps et l’utilisation du corps féminin), la première partie, Figuration narrative, est sympa mais pas transcendante (à mes humbles yeux, bien entendu !).
Pour ma part, le déclic a eu lieu avec l’hommage à Marcel Duchamp et son bidet, et surtout l’utilisation des néons qui apparaissent dans les Tableaux Binaires. C’est ce qui me plait dans l’art. Le moment où l’artiste mono support fait entrer des éléments extérieurs et devient un plasticien à part entière.
J’ai commencé à rentrer de plus en plus dans l’univers de l’artiste, avec la série Enfermements qui est « un travail sur la mémoire. La conscience de l’Holocauste. Une métaphore sur le thème de la non communication ». J’aime l’idée de prendre une partie pour raconter un tout. Comment une bâche sur un derrière de wagon de train peut signifier plus que ce que l’œil perçoit au premier abord. Ces œuvres m’ont fait frissonner et un lien s’est établi entre l’univers de Peter Klasen et moi.
La
partie sur le Mur de Berlin m’a aussi beaucoup touchée.
La partie Life is Beautiful, par le développement des nouvelles techniques, mais toujours cette ambition de sortir du mono support en rajoutant des néants et autre m’a beaucoup plus. Sur une œuvre dont le nom m’échappe, on voit un bras sortir d’une couverture qui est réelle (pas dessinée, une vraie couverture !). La tentation de tirer dessus pour voir qui se cache en dessous est très forte.
La
rétrospective s’achève sur la Colonie Pénitentiaire, œuvre pour laquelle Peter
Klasen nous livre sa vision de la nouvelle de Kafka du même nom. Derrière un
mur épais, se cache
« Cette poulie qui est en moi. Une petite dent avance, quelque part dans un endroit caché, on le sait à peine au premier moment et déjà tout l’appareil est en branle. Soumis à une puissance inconcevable, tout comme la montre qui paraît soumise au temps, il fait entendre des craquements ça et là ; et l’une après l’autre, toutes les chaînes descendent avec un bruit de ferraille le bout du chemin qui leur est prescrit. » Kafka, 1913.
Le petit fascicule donné au début de l’exposition synthétise très bien l’œuvre : « La nouvelle met en histoire cette vision de cauchemar. Elle raconte de manière prémonitoire, l’histoire d’une exécution, au moyen d’une machine à tuer proprement infernale, qui marque les corps au moyen d’aiguilles, comme seront plus tard marqués les juifs dans les camps ». Pour Klasen, Kafka utlise « un langage bureaucratique qui sera celui des SS, comme une sorte de prémonition insupportable. Là, on est dans l’effroi de ce que nous connaissons des camps. »
Une vidéo très courte (et pas terrible pour la qualité) de ce qui se cache derrière le mur.
En conclusion, un très grand artiste, dont j’ai adoré découvrir les œuvres.
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