La joie immense d'un jeune homme perché entre deux mondes (blocs) 1989 [ © Raymond Depardon].
La chute de l'affreux édifice le 9 novembre 1989 s'explique en premier lieu par l'état de déliquescence dans lequel est plongé le bloc soviétique depuis une dizaine d'années. Les réformes engagées par Gorbatchev ne parviennent pas à sauver le système. En relâchant la pression sur les démocraties populaires, l'URSS s'avère incapable d'étouffer les attentes immenses de libertés des populations d'Europe de l'est. Tout au long de l'année 1989, ce processus d'émancipation se fait jour, d'abord en Pologne ou en Hongrie, puis bientôt dans tous les Etats satellites. L'ouverture des frontières de la Hongrie avec l'Autriche, le 22 septembre 1989 constitue ainsi la première brèche dans le “rideau de fer”.
Le centre Leipzig noir de monde, le lundi 17 octobre 1989.
En RDA, à partir du mois de septembre 1989, d'importantes manifestations ont lieu dans les grandes villes d'Allemagne de l'est, notamment Leipzig. Les participants y réclament la liberté de parole, de presse et de rassemblement. Tous les lundis, une foule sans cesse plus dense réclame l'instauration de réformes. Ces rassemblements se déroulent dans le calme, mais les manifestants redoutent la réaction des autorités. Les souvenirs des terribles répressions de 1953 à Berlin-Est, 1956 à Budapest, 1968 à Prague restent dans tous les esprits. Le lundi 9 octobre, la Stasi et l'armée populaire nationale semblent déterminées à en découdre et à utiliser la force. Or, Michaël Gorbatchev fait savoir que l'URSS n'interviendrait pas en RDA. Il s'agit incontestablement d'un tournant. A la tête de ces rassemblements se trouvent de nombreux pasteurs protestants. L'Eglise protestante de RDA tente en effet de fédérer les oppositions et contribue à influer sur les formes de la contestation (avec des chants, prières pour la paix). Dépassées, les autorités se rendent vite compte que le statu quo est intenable.Le rigide Erich Honecker est ainsi remplacé par Egon Krenz, plus conciliant. En fait, la situation reste instable et la désintégration du pouvoir bien avancée, comme vont le prouver les événements des jours suivants.
Le Mur de Berlin, symbole et coupure matérielle des deux Allemagne et des deux blocs, repose toujours sur de solides fondations. C'est en fait, une conférence de presse mal préparée qui précipite la chute du Mur. Günter Schabowski, un officiel subalterne, fait une bourde monumentale (c'est le cas de le dire) lors d'un discours à la télévision le 9 novembre 1989. Il y lit un projet du conseil des ministres en direct à la télévision. “Nous avons décidé aujourd'hui d'adopter une réglementation qui permet à chaque citoyen de la RDA de se rendre à l'étranger par les postes-frontières est-allemands“. Interloqués, les journalistes l'acculent dans ses retranchements lui demandant si cela signifie que le mur est ouvert et surtout à partir de quand? Hésitant, Schabowski, incertain, lance: “pour autant que je sache, immédiatement, sans délai“.
Dès le lendemain de la chute du Mur, des files de Trabant quittent librement Berlin-Est.
Aussitôt, l'information est reprise en boucle par les médias occidentaux. Des caméramen s'installent au niveau des postes-frontières, bientôt suivis par des Allemands de l'est. Timidement, certains tentent de passer. Les gardes-frontières, tout aussi déconcertés, tamponnent les passeports et laissent les individus passer à l'ouest. Très vite, l'affluence exceptionnelle rend ces contrôles totalement vains. Tous les postes de contrôle de la ville sont bientôt ouverts. Dans les jours qui suivent, des centaines de milliers d'Allemands de l'Est visitent Berlin-Ouest.
Photo prise le 10 novembre 1989 au niveau du pont de Brandebourg.
Le Mur est tombé (même si son ouverture officielle n'a lieu que le 22 décembre 1989). Le SED (le parti communiste au pouvoir) ne lui survivra pas. La perte de tout contrôle sur cette frontière précipite sa chute. Le régime n'était plus, depuis longtemps, qu'une coquille vide privée de tout soutien populaire. Les populations avaient en quelque sorte pris leur parti de cette situation. Une fois l'entrave que constituait le Mur, levé, le régime s'effondre tel un vieil arbre, totalement vermoulu.
Sources:
* Numéro 346 de L'Histoire (octobre 2009) consacré au Mur de Berlin.
- Entretien avec Etienne François: “la RDA a-t-elle vraiment existé?”, in L'Histoire n°346, octobre 2009.
- Edgar Wolfrum: “Sept questions sur un mur”, in L'Histoire n°346, octobre 2009.
Liens:
* Une chanson de Balavoine, “Lady Marlene“, nous permet d'évoquer la construction du Mur sur l'Histgeobox.
* Une bonne sélection de liens sur la ville.
* Le dossier que TV5Monde consacre à la chute du mur. Avec notamment le Mur de Berlin vu par les caricaturistes.
* 20ème anniversaire de la chute du Mur de Berlin. Dossier du site “Tout l'Europe.fr”.
* Le Mur de Berlin 2009 sur le site de la Bibliothèque du Centre Pompidou.
* Riche contenu sur un site officiel allemand.
* Histoire du Mur et décorations du Mur depuis sa chute.
* Lyonel Kaufmann propose un tour d'horizon des ressources de la toile: “Une ville dans le siècle: Berlin et la chute du mur (1989-2009)”.
- “La construction du Mur de Berlin” sur le blog de Richard Tribouilloy.
* Sur le blog de J.C. Diedrich: “Celui qui a sauté par dessus le mur“.
* Le très riche dossier que la chaîne Arte consacre au Mur: “le mur raconté par les Berlinois” ou encore “RDA le mur des sons“. Le blog “ma vie en 89“.
* Le mémorial de Caen consacre un dossier complet au mur de Berlin.
* Animation sur la mise en place du mur.
* Site consacré au Mur (nombreuses cartes).
* Photos autour du mur.
* Leipzig octobre 1989:
- Sur le site d'Arte: “Le miracle de Leipzig“.
- 20 minutes.fr: “Leipzig 1989: Début de la fin du Mur“.
* “L'histoire secrète du Mur de Berlin”. Les épisodes de cette chronique que France Info consacre au Mur jusqu'au 11 novembre sont disponibles en écoute sur le site de la radio.
* L'émission “Rendez-vous avec X” sur France Inter va consacrer ses futures émissions au Mur. A suivre donc.