D’après un expert de l’Insee – inspecteur général honoraire de l’Insee et président de la commission de déontologie de la société française de statistique, excusez du peu – « il n’y a pas de vague de suicides à France Télécom ».
Explication :
“En 2007, on avait pour la population d’âge d’actif (20 et 60 ans) un taux de suicide de 19,6 suicides pour 100 000″, explique-t-il. “24 suicides en 19 mois, cela fait 15 sur une année. L’entreprise compte à peu près 100 000 employés. Conclusion : on se suicide plutôt moins à France Télécom qu’ailleurs”, affirme-t-il. (source : Le Monde, 19-10-09)
Donc, circulez, ya rien à dire ! D’ailleurs tout ce qui est dit sur le sujet relève d’un « délire du corps social ». Et d’en appeler à la psychiatrie. Tout au plus reconnait-il ce délire comme un symptôme d’un « mal-être social » !
Comme le fait remarque un abonné du Monde dans les commentaires :
[...] la statistique est réelle, simplement le problème c’est que les salariés de France Télécom ne se sont pas suicidés d’une manière ’anonyme’ c’est à dire sans donner les raisons de leur acte, mais au contraire en écrivant des lettres et même en se suicidant sur leur lieu de travail, c’est bien cela le problème pour la direction de FT !!
Et oui, le coeur du sujet c’est la cause du suicide, la population concernée et le contexte, le monde de l’entreprise. Or que nous dit le taux annuel cité de 19,6 pour 100 000 ? Rien.
C’est un taux général toutes causes confondues pour l’ensemble des 20-60 ans. Il serait intéressant d’avoir des éléments de comparaison plus proches du contexte de France Télécom : taux pour la population active, les salariés du même secteur ou de la même taille d’entreprise… En tous cas ce taux très général ne permet pas de conclure aussi doctement que le fait notre expert que l’on « se suicide plutôt moins à France Télécom qu’ailleurs ».
Il faudrait mieux cerner le sujet. Ce que ne manquera pas de faire le président de la commission de déontologie de la société française de statistique… Et l’on ne saurait trop conseiller à cet éminent expert de la statistique le chiffre 7. Sept, comme tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de parler.
Tiens, en tapant les termes “suicide insee” sur Google, je suis tombée sur une étude de Louis Chauvel, La croissance du suicide et les problèmes de la société française après les Trente Glorieuses, où l’on peut lire :
Pour autant, il est clair aussi que les valeurs de mobilité ascendante, d’intégration parfaite, de succès dans la compétition, sont peu à peu infondées, voire nuisibles, simplement parce que l’on ne peut plus croire que tous accéderont à ce modèle. En inculquant et en jugeant les jeunes selon ces valeurs et ces critères, qui auraient convenu à la génération précédente et non aux nouvelles, on fabrique certainement moins de succès que de frustrations, d’incompréhension de son sort personnel et à terme d’échecs existentiels.
A méditer.
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