Depuis que j'ai soutenu ma thèse de doctorat en droit sur "le principe de précaution", je note que, régulièrement, ce principe est remis en cause. Ainsi, en octobre 2007, la Commission pour "la libération de la croissance", présidée par Jacques Attali, avait déjà proposé de supprimer la référence au principe de précaution, à l'article 5 de la Charte de l'environnement.
Aujourd'hui, c'est Bernard Accoyer, Président de l'Assemblée nationale qui demande, plus prudemment, une évaluation de la mise en oeuvre du principe de précaution dont "l'interprétation par certains favorise, selon lui, "l'immobilisme" et "la passivité", précise la dépêche AFP reproduite ci dessous.
A mon sens, l'évaluation devrait davantage porter sur les raisons pour lesquelles ce principe est si peu appliqué. En effet, on parle beaucoup de ce principe mais la loi ou la jurisprudence y font, somme toute, assez peu référence. En réalité les champs d'application du principe de précaution sont assez rares, qu'il s'agisse des OGM ou des effets sanitaires des radiofréquences.
Tout le problème est que le principe de précaution est systématiquement confondu avec le principe de prévention. La précaution ne s'impose qu'en univers d'incertitude scientifique, lequel se caractérise par des doutes, des hypothèses non validées, des controverses et des connaissances fragmentaires. Au contraire lorsque l'on dispose de la littérature nécessaire pour caractériser et probabiliser un risque, c'est bien le principe de prévention qui doit être observé.
Aucune chance donc que le principe de précaution ne bloque le progrés des connnaissances scientifiques ou même la croissance économique. Bien au contraire, il est utile de relire l'excellent rapport rédigé par Philippe Kourilsky et Geneviève Viney et remis à Lionel Jospin alors qu'il était Premier ministre, pour s'en convaincre.
Contrairement à ce qui est souvent affirmé, le principe de précaution suppose une accélération et un renforcement des moyens de la recherche scientifique, dés l'instant où celle-ci est contradictoire, pluraliste, continue et indépendante. Il est garant du progrés et non son contraire. Mais bien entendu chacun aura sa définition du progrés et l'on se rappelle que Bernard Accoyer était intervenu, lors du débat relatif au moratoire français sur l'OGM MOn 810, pour critiquer assez durement l'avis émis par le Comité de préfiguration présidé par le sénateur Jaen-François Legrand. (photo AFP)