Pendant quelques jours et dans le prolongement du Salon de la Revue qui vient de se tenir à Paris, les poèmes choisis pour l’anthologie permanente le seront dans différentes revues. Par ailleurs sera publié rapidement sur le site un « Poezibao a reçu » spécial revues. Il s’agit ici de souligner l’importance des revues pour la connaissance et la diffusion de la poésie. Et de rappeler que les revues vivent presqu’exclusivement des abonnements, leur diffusion en librairie étant en général quasi nulle.
Les poèmes choisis aujourd’hui sont extraits de la revue Rehauts, revue semestrielle d’Art et de Littérature, 105 rue Mouffetard, 75005 Paris. Abonnement, 22 € pour deux numéros. La revue est animée par Hélène Durdilly, Jean-Pierre Chevais et Jacques Lèbre. Au sommaire du numéro 24, qui vient de paraître, Jean-Michel Binsse, Charlotte Boizet, Pierre Chappuis, Claude Dourguin, Daniel Kay, Jacques Lèbre, Jean-François Le Gal, Ossip Mandelstam, Robert Marteau, Pascale Petit et Jan Vladislav. Dessins de Alexandre Hollan, Guy Le Meaux et Alain Tirouflet.
Cahiers de Voronej (extraits)
Me dépouillant des mers, de la course, de l’envol,
et donnant à mon pied socle de terre violente,
qu’avez-vous gagné ? Éblouissant calcul :
le frémissement des lèvres vous n’avez pu le prendre.
(mai 1935)
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Ce cher levain du monde –
sons, larmes, labeurs –
les accents pluvieux
des malheurs qui commencent à bouillir
et les pertes phonétiques,
d’om, de quel minerai, les retirer ?
Première fois que dans la mendiante
mémoire tu pressens ces fosses
aveugles, pleines d’une eau cuivreuse –
et sur leurs traces tu marches,
de toi dégoûté, de toi inconnu –
à la fois l’aveugle et son guide
(janvier 1937)
Ossip Mandelstam, extraits des Cahiers de Voronej, traduits du russe par Jean-Claude Schneider, in revue Rehauts, n° 24,pp. 62 et 69.
Ossip Mandelstam est né en 1891. Victime des purges staliniennes, il est envoyé une première fois en exil, en 1934, à Voronej où il rédige trois cahiers de poèmes. Libéré en 1937, il est à nouveau arrêté l’année suivante et envoyé dans un camp près de Vladivostok où il meurt en décembre 1938. (note publiée dans la revue Rehauts)