Au début de la soirée, lorsque tous les invités furent présents, l'ambassadrice nous convia dans une pièce deux fois plus grande, attenante à la première. Elle se mit face à nous et à proximité de son illustre invité. Puis, apercevant le probable conseiller du Député perdu dans la foule des convives, elle le pria de les rejoindre ; ce que fit le jeune homme, dont le visage rubicond révélait la vive émotion que paraissait lui procurer cette position de figurant muet.
A moins que ce ne fut un rasage matinal dont je supputai qu'il avait été douloureux.
En s'adressant à l'assistance, Madame l'ambassadrice d'abord, remercia vivement de sa présence Monsieur le Député, qui, à son tour remercia chaleureusement Madame l'ambassadrice pour son invitation.
Comme ça c'était fait !
Ces mutuelles et publiques salamalecs achevées, Monsieur Roland Blum improvisa un discours rapide sur les raisons de sa présence : la candidature de l'Islande à l'adhésion au sein de l'UE. Un discours consensuel d'un bout à l'autre, qui nous permit d'apprendre que cette adhésion serait une bonne chose pour l'Islande, comme pour l'Europe, que la France ferait tout son possible pour l'appuyer, mais que le chemin serait certainement long et difficile.
On a frôlé le scoop de l'année.
Dans un registre comparable, cela m'a fait pensé à ce sketch au cours duquel Coluche se gausse des déclarations insignifiantes faites suite à la rencontre de deux chefs d'état et dont les journalistes se font l'écho :
"Le Chancelier Allemand a été reçu cordialement par le Président de la république qui a descendu deux marches pour l’accueillir en signe de détente. La poignée de mains a été longue et chaleureuse. Les chefs de gouvernement se sont refusés à tout commentaire".
Un peu plus tard, ayant eu l'occasion de converser une dizaine de minutes avec Roland Blum, en compagnie d'une dame qui attendait désespérément de pouvoir s'entretenir avec le correspondant du Monde, l'homme s'est toutefois montré cordial et souriant. Il a même fait preuve d'une curiosité bienveillante à notre égard, nous interrogeant tour à tour sur nos biographies respectives, avant de chercher à s'éclipser discrètement, de crainte de manquer son vol prévu tôt le lendemain.
Un sacerdoce, je le répète.
La réception s'est achevée aux alentours de 21h30 au lieu des 20h00 espérés par notre hôtesse, qui ne put se résoudre, protocole oblige, à jeter dehors les quelques joyeux lurons encore présents, et qui, après les pépins de raisin, s'interrogeaient maintenant sur les vertus organoleptiques des couilles de mouton.
En repensant à cette soirée, je me suis d'abord souvenu d'une curieuse nuit passée avec Nicolas Sarkozy, avant de me remémorer ce spot publicitaire pour une célèbre et néanmoins médiocre marque de chocolats. Je fus donc sincèrement d'autant plus ravi d'avoir assisté à cette réception que la collation servie fut autrement plus délicieuse que ces insipides "rochers" chocolatés.