Certains documentaires se laissent regarder sans difficulté. Quand on apprend l’histoire de Rachel Corrie, jeune américaine partie supportée la population de Gaza en 2003, on en ressort le souffle coupé. Surtout que Rachel y a laissé sa vie, sous les chenilles d’un bulldozer israélien. Accident sans doute, mais intentionnel? On ne le saura jamais, et c’est là toute l’intelligence de ce film qui vient offrir un éclairage plus humble sur un conflit des plus complexes, tout en offrant une certaine vérité à un auditoire loin du sifflement des balles et des obus.
2003, ça n’est pas si loin, et Simone Bitton nous raconte une nouvelle histoire dans les méandres du conflit israelo-palestinien. Une guerre qu’elle connaît bien pour en avoir fait le sujet de ses films depuis plus de dix ans, toujours en restant en marge des combats pour se concentrer les conséquences ou les dérives des deux camps. On se base évidemment plus ici sur la politique israélienne de vouloir creuser une véritable séparation avec le camp adverse, sans tenir compte des familles innocentes, de leurs maisons et donc des volontaires internationaux venus les soutenir. Voici une vérité irréfutable, celle de la destruction de culture et immeubles sans réelles raisons au nom d’une sécurité bien mystérieuse. Ironiquement réaliste, le film n’épargne rien, de la naïveté de ses jeunes gens d’Angleterre, Ecosse, Etats Unis ou ailleurs venus se planter devant les chars et pelleteuses de plusieurs dizaines de tonnes, à une organisation les entraînant à une lutte pacifique mais relativement inutile, aux combattants d’Israel aveuglés par des chaînes de commandement anonymes, des enquêtes inutiles et corrompus à la base (saccage de la scène de l’incident, retrait des indices..), d’une volonté d’Israël d’éradiquer les Palestiniens dans un rayon d’un kilomètre autour d’un mur de sécurité, la famille de Rachel aux Etats-Unis lisant ces courriers frappés d’une vérité absolue.. On ne verra pas l’ombre d’un terroriste ici (heureusement pour les journalistes), mais des populations en drame, des enfants jouant à l’ombre des chars, des familles terrorisées par le tir incessant des balles, jour et nuit. Un triste constat pour un bilan toujours identique ; ce conflit n’est pas prêt de se terminer avec deux armées l’une face à l’autre.
Dans tout ça, on en retire quand même plus un reportage qu’un réel film. Si ce n’est la durée (1h40), « Rachel » se rapproche d’un vrai travail journalistique dans la forme et le fond, laissant la réflexion à son spectateur, sur fond d’interviews, d’extraits d’archives et éléments d’actualité. Une vraie mine d’or, retrouvant même des vidéos de l’armée israëlienne (entretenant cette fois le doute sur l’incident version israëlienne..) et offrant un mélange bien dosé entre émotion et vérité. Un travail qui mérite donc d’être amplement communiqué, que ce soit sur grand ou petit écran.