Une cote d’avenir à la progression exemplaire jusqu’en 2007
Souvenez-vous. En novembre 2006, à l’occasion des primaires du Parti Socialiste, les militants choisissaient massivement Ségolène Royal comme candidate à l’élection présidentielle de 2007. A l’époque, probablement agacés par l’ascension rapide de la présidente de la région Poitou-Charentes, certains la surnommaient la « Madonne des sondages» et parlaient de « manipulation médiatico-sondagière» . Pourtant l’étude de la cote d’avenir TNS Sofres – Figaro Magazine de l’ancienne ministre de Lionel Jospin met en exergue le caractère exemplaire de sa progression politique : régulière et inarrêtable.
Entre 1997, date de son entrée dans ce baromètre, et 2002, entre 40% et 50% des Français affirmaient chaque mois souhaiter voir la ministre déléguée à l’Enseignement puis à la Famielle jouer un rôle dans la vie politique à l’avenir. A titre de comparaison, Bernard Kouchner, personnalité la mieux notée de la vague d’octobre 2009 de ce classement recueille un score de 45%. Femme jeune et pugnace, elle incarnait ainsi à l’époque les espoirs de beaucoup de Français.
Suite à la victoire de Chirac à la présidentielle de 2002 et au retour aux affaires de la droite, elle disparaît du premier plan du paysage politique. Sa cote d’avenir s’en ressent évidemment : elle retombe en-deça des 40% d’opinions positives, mais arrive à maintenir une présence suffisante et les scores qu’elle recueille, autour de 30-35%, sont l’équivalent de ceux enregistrés ces temps-ci par Martine Aubry ou François Bayrou.
C’est son élection à la tête de la région Poitou-Charentes en mars 2004 qui va lui permettre d’acquérir une nouvelle dimension dans l’opinion. Symbole de la conquête par la gauche de la quasi-totalité des régions françaises, elle est identifiée par les Français comme la femme de l’avenir, et par les sympathisants de gauche comme l’espoir de victoire en vue de l’élection présidentielle. Sa personnalité bien mise en valeur lui permet de progresser dans le coeur de nos concitoyens et d’atteindre une cote d’avenir de 61% en décembre 2006, quand un certain Nicolas Sarkozy n’arrivait pas à dépasser 50%.
Une personnalité qui clive, une popularité qui chute
Comme nous l’avons déjà souligné dans un article sur Ségolène Royal, sa défaite à l’élection présidentielle1 n’a pas été suivi d’un réel enthousiasme ou de la construction d’une personnalité d’opposition permettant de croire à un lendemain qui chante, comme les ont connus François Mitterand ou Lionel Jospin. Au contraire, comme le montre l’évolution de la popularité de Ségolène Royal à partir de 2007, s’en est suivi une rapide descente aux enfers.
La popularité de Ségolène Royal entre 2003 et 2009
Grâce à une stratégie d’occupation de l’espace lui permettant de progresser en notoriété, Ségolène Royal a connu une progression de popularité au cours de laquelle la majorité des personnes qui la découvraient semblaient séduite par le personnage. Mais à partir de la fin de l’année 2006, la stratégie ne s’est plus avérée payante. Continuant à être très présente par la campagne électorale, puis par une logique de marquage « à la culotte» du nouveau pouvoir en place et des dirigeants socialistes, la personnalité de l’ancienne Madone a commencé à lasser : après la cruelle déception du résultat du 6 mai 2007, les Français n’ont pas semblé lui pardonner de n’avoir pas su aller jusqu’au bout des espoirs qu’ils avaient placés en elle. A partir de janvier 2007, la proportion de Français ayant un jugement défavorable à son égard n’a cessé d’augmenter.
Aujourd’hui l’ancienne candidate a atteint des niveaux d’antipathie dans la population rarement atteint par des personnalités de la gauche et de la droite parlementaire. Elle a même battu en part de jugements défavorables des hommes politiques réputés pour leur impopularité : pire que Laurent Fabius et Jean-Pierre Raffarin après le vote de 2005 sur la constitution européenne, pire même que les meilleurs scores atteints par Alain Juppé ou Philippe de Villiers, des poids lourds considérés comme quasi imbattables. Devant seuls les Le Pen père et fille gardent encore un peu de distance avec l’ex-candidate socialiste. Rassurez-vous d’ailleurs, ils conservent encore une avance non négligeable.
De l’engouement incroyable de 2006 à l’antipathie de 2009, Ségolène Royal n’est toutefois jamais passée inaperçue. Au contraire sa personnalité clive les opinions. Un sondage auprès des hommes de 15 ans et plus sur les femmes » préférées» des Français montre à quel point elle ne laisse pas indifférent : 3ème au classement de la femme au plus fort caractère, 4ème femme la plus intelligente et la plus sérieuse, 5ème femme la plus courageuse, elle est également la première au classement de la moins honnête, 2ème femme la plus froide, 3ème la plus cruelle, 5ème la plus naïve, 6ème la plus peureuse. La personnalité de Ségolène Royal que les Français perçoivent atteint même un sommet de contradiction : elle est à la fois la 3ème femme la plus radine et la 4ème la plus dépensière.
Aujourd’hui fortement controversée, l’ex-ministre n’a plus qu’un Désirs d’Avenir mal en point, des soutiens politiques isolés et un mandat de président de région à conserver pour continuer à espérer pouvoir prendre l’Elysée en 2012. S’il est toujours difficile de savoir comment la popularité se convertit en vote dans les urnes, l’impopularité de Ségolène Royal n’est certainement pas un atout, face à des personnalités de gauche qui ne lui laisseront pas la main facilement et une droite qui ne peut que se réjouir de voir s’enfoncer l’ancien meilleur espoir féminin.