Ils ne sont pas normaux. Ils voudraient l'être, mais n'y arrivent pas. Alice, elle, boite depuis un grave accident, mais le mal(-être) la rongeait déjà. Elle existe que parce qu'elle y est obligée, souhaitant voir s'effriter son corps, le voir se dissoudre, se voir disparaître en fuyant la nourriture. Mattia, lui, est surdoué, passionné des mathématiques, particulièrement par les nombres premiers. Sans doute est-il autiste -le syndrome d'Asperger- et a-t-il basculé un peu plus loin de la normalité après la disparition de sa soeur Michela. C'est le récit de leur solitude que nous suivons depuis un événement perturbateur, puis à travers l'adolescence chaotique et le monde adulte. Ils sont un peu comme les nombres premiers qui obsèdent tant Mattia: divisibles que par 1 ou par eux-mêmes mais dont certains possèdent un jumeau dont ils ne sont séparés que par un nombre pair. Ils se trouveront, un beau jour, attirés l'un vers l'autre comme ces jumeaux mathématiques, mais si différents. Ils suivront pendant un temps des chemins paralèlles, reliés par un fil singulier, indéfinissable. Mais la conciliation des nombres premiers est-elle possible?
J'ai été happée par l'écriture de Paolo Giordano. Il y a quelque chose de dégagé dans son ton qui, malgré la profondeur et la tristesse des protagonistes, m'a engluée à l'histoire, m'a fait aimer Alice et Mattia (envers et contre moi-même). Je n'en ressors pas indemne. Je suis amère. Je suis triste. Je n'aime pas ce genre de fin. Je suis amoureuse des happy end. Les vrais, les «ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants», les «ils n'étaient plus seuls désormais» que sous-entendent tant de fins. Il n'en demeure pas moins que ce roman est captivant. Je comprends le phénomène (plus d'un million d'exemplaires vendus en Italie). Je suis déroutée, je ne sais pas ce que cette lecture m'aura apporté. Ce n'était pas un plaisir de lecture comme j'en connais souvent, où, clairement, quitter les personnages m'attriste et me fait mal. Ici, j'étais soulagée de les quitter. Mais, je ne pouvais m'arrêter de lire. 4.25/5