Etna hallucine

Publié le 15 octobre 2009 par Porky

Certes, Etna, en raison de ses origines méditerranéennes, est portée à l'exagération. Certes, elle est tout à fait capable de transformer une banale anecdote en épopée homérique. Mais ce qu'elle a découvert il n'y a pas très longtemps l'a rendue muette de stupeur -et de frayeur, vous allez comprendre pourquoi. 

Muette, Etna, direz-vous ? Non, c'est un effet de style. En effet, c'en est un. Car Etna, même en proie à l'hallucination, reste Etna, c'est-à-dire incapable de taire les visions cauchemardesques qui s'imposent à son esprit.

Voilà certes un début énigmatique. Qui promet peut-être de succulentes révélations. Dans un sens, ce n'est pas faux : maintenant affirmer que lesdites révélations sont succulentes serait peut-être pousser un peu loin la métaphore culinaire.

Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'elles sont consternantes. Et terrifiantes.

Etna a un fils. Jusque là, rien de particulièrement alarmant. Son fils est en CM1, dans une école... nous dirons... huppée ? Pas forcément. En tous cas, de grand renom sur la place de Lyon.

Et, forcément, il a une institutrice.

Etna étant une bonne mère de famille, elle se rend assidûment aux réunions organisées par l'école, suit attentivement les devoirs de son fils et vérifie chaque soir qu'il fait bien son travail.

Et ne voilà-t-y pas qu'il y a une quinzaine de jours, menant son fils à l'école, elle avise une sorte d'affiche placardée sur la porte de l'école (ou ailleurs, peu importe) : peu importe également le contenu global de l'affiche.

Etna, curieuse, lit. Et tout à coup, les yeux lui jaillissent des orbites : elle hallucine, c'est sûr, elle a des visions, il faut qu'elle consulte de toute urgence un psychiatre, parce que là, elle doit se prendre pour Jeanne d'Arc ou une autre allumée du même style.

Mais qu'a-t-elle donc vu, bon sang ! vous exclamerez-vous, au bord de la crise de nerfs. Rien de plus que cette phrase : « ... pour cela, il a fallu travaillait durement. »

Remise de ses émotions, Etna se dit : « c'est une erreur, une faute d'étourderie. Ce n'est pas grave, n'en faisons pas tout un plat. » Elle rentre chez elle et le soir, vérifie le travail de son fils.

Devoir : conjuguez le verbe parler à l'impératif présent : Son fils a écrit, « parle », « parlons », « parler ». Etna s'indigne : Tu ne pourrais pas faire attention, non ? Réponse du fils : Mais c'est ce qui est marqué dans la fiche outil que la maîtresse nous a donnée. Vérification immédiate de la part d'Etna et deuxième poussée de fièvre hallucinatoire : sur la fiche, le « chantez » est devenu « chanter ».

Non, se dit Etna, ce doit être encore une erreur. Elle impose à son fils la rectification ad hoc et on n'en parle plus.

Quelques jours plus tard, Etna feuillette par hasard les fiches outil de son fils : liste des pronoms personnels : Je, tu il, etc... Mais soudain, troisième hallucination : « leur » pronom personnel invariable est devenu dans la liste « leurs ».

Cette fois, Etna se décide à réagir, mais de façon fort polie : elle fait simplement remarquer à la maîtresse, un soir qu'elle vient récupérer son fils, qu'il y a un problème avec le « leur » pronom personnel et que la jeune dame a dû se tromper.

Réponse de la maîtresse : « Ah, mais ce n'est pas moi qui l'ai rédigée. Cela a été fait par le collectif des maîtres de CM1... »

Pour un moment, Etna en perd le souffle et la parole. Mais pour un moment seulement. La preuve...

Quand je vous dis que cette histoire est terrifiante...