Une catastrophe écologique qui dépasse les apiculteurs se joue en ce moment avec la prolifération de la mouche d'Indonésie appelée la tenthrède. La mouche bleue, cibdela janthina, introduite volontairement à La Réunion en décembre 2006 par le Cirad pour lutter contre le raisin marron, perturbe l'activité des abeilles, menaçant ainsi toute la filière apicole.
En 2006, les recommandations de CABI Biosciences (commandée par la Région) demandaient des expériences complémentaires mais la Préfecture, sur la base de l'avis favorable du CSRPN (conseil scientifique régional du patrimoine naturel), a autorisé le Cirad en décembre 2006 à procéder à l'introduction de la mouche.
On a oublié que nous vivons sur une île tropicale. Où sont les mesures de précautions ? On oublie trop vite toutes les expériences qui ont déjà été faites antérieurement et qui sont des catastrophes pour notre environnement.
Dans ce jeu de poker menteur où chacun assure détenir LA vérité, une seule voix manque au débat : celle de la Chambre d'agriculture et de son Président d'ordinaire pas avare en commentaires avisés sur tous les sujets.
La Chambre d'Agriculture soutient les apiculteurs ? La Chambre d'agriculture soutient la tenthrède et par voie de conséquence soutient le Préfet et le CIRAD ? On n'en saura rien. Ce silence s'explique vraisemblablement par une volonté de ne pas froisser l'administration (au plus haut niveau départemental) qui a cautionné les lâchers de mouches sans prendre les précautions nécessaires. Le prix de ce silence n'est sans doute pas étranger aux annonces sur la bagasse, et la survie de quelques apiculteurs n'est rien comparée à une augmentation de la canne à sucre pour des centaines de producteurs de canne.
La diminution de la production de miel est une réalité à La Réunion et les conséquences de la tenthrède s'annoncent dix fois plus négatives que la désinsectisation du chikungunya. Des collègues parlent d'une diminution de 95 % du miel de letchis, de la disparition de ruchers, de la mort de dizaines de colonies d'abeilles, nous laissant dans un désarroi. Les apiculteurs sont en difficulté mais demain devant l'invasion de la mouche bleue ce sera au tour des arboriculteurs, des maraîchers d'aller pleurer suite au manque de pollinisation des letchis et il faudra peut-être importer des letchis chez nous.
Nous deviendrons tous producteurs de canne à sucre que nous mangerons.
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