Bio
est un DJ français né en 1961. C'est en 1979, en partant vivre aux Etats-Unis que Dee Nasty découvre les débuts du hip-hop, avec le graffiti, la breakdance et le funk scandé comme celui de Sugarhill Gang.
Il est connu depuis 1982 pour avoir travaillé dans une radio pirate avec son complice le rappeur Lionel D. C'est fin1984 qu'il sort l'album 'Paname city rappin', autoproduit et au dos de la pochette duquel Dee Nasty avait laissé son numéro de téléphone personnel (ce qui prouve le confinement du rap français, considéré, après la mise en lumière opérée par Sidney (animateur) dans son émission H.I.P H.O.P en 1983-1984, comme déjà dépassé !), et qui est introuvable aujourd'hui. Premier album de rap français et pratiquement unique représentant du rap old school en France avec le titre, entre autres, Metro scratchin, qui est une bonne description des débuts de la culture hip-hop française, uniquement représentée jusque-là par le graffiti et la breakdance.
Par la suite, il se fait connaitre d'un public plus large en 1985 en organisant les défis hip-hop du terrain vague de La Chapelle (quartier), en insérant des flyers (petits prospectus) dans les pochettes des disques funk et hip-hop américains. C'est lors des sessions de ce terrain vague, ou étaient représentés les cinq arts du hip-hop (graffiti, breakdance, DJing, MCing, beatbox) que débuteront les futurs NTM ou Assassin. Membre de l'Universal Zulu Nation, il a fait la première partie de la tournée française d'Afrika Bombataa -un des pères du hip-hop musical avec Grandmaster Flash et DJ Kool Herc-. Sortant souvent des maxi, comme Deenastyle n°1 en 1987 ou So Funky/Bouge en 1989, il est peu prolixe en album. Vénéré aujourd'hui par de nombreux rappeurs et disc jokeys de l'hexagone, c'est lui qui a fait connaître, notamment, NTM, Assassin (groupe) ou IAM en lançant ces groupes sur radio Nova. Abandonnant le MCing (partie vocale du hip-hop, scandaison de texte) dés 1984, après son premier album il se consacre depuis exclusivement au DJing (partie musicale du rap, reposant principalement sur le maniement de vinyles). Il a participé en 1999 à l'album 'Double H Dj Crew' de Cut Killer.
Interview
NightLife : C’est aux Etats-Unis, en 1979, que tu découvres le Hip-Hop... Dee Nasty : En fait j’étais déjà à fond dans la soul. Je connaissais le Hip-Hop, mais en arrivant à San Francisco ce fut le choc ! J’ai découvert une culture urbaine, un mode de vie. C’était visible partout. Il y avait des breakers, des grapheurs, du gros sons dans toutes les rues. Mais je ne m’étais pas rendu compte que derrière tout ça il y avait un vrai mouvement.
Tu reviens en France. Où en est le Hip-Hop ? Existe-t’il un mouvement ?
Quand je reviens en France, il n’y a rien. Il faut attendre 1982 et la venue d’Africa Bambaataa (lors de la tournée “New York Rap City“) pour que le phénomène se déclenche et que l’on prenne conscience que le Hip-Hop est un mouvement. Très peu de gens connaissaient. Il est arrivé avec une philosophie qui a gagné beaucoup de monde. C’était la révolution pour nous.
À cette époque tu “sévis“ dans une émission (“Arc en Ciel“) sur une radio pirate... C’est à partir de ce moment-là que tu as voulu faire découvrir le Hip-Hop ?
Oui... C’était une radio qui émettait sur le nord de Paris. Je menais déjà un combat pour la Funk, le Hip-Hop allait être mon combat “ad vitam“. Ca a été un coup de cœur. J’ai donc commencé à rapper, à breaker, mais finalement je n’étais pas très doué (rires). J’ai donc décidé de faire passer le message par les platines...
En 1987, tu te poses à Nova pour une émission “Deenastyle“ (avec Lionel D) qui va bouleverser à jamais le paysage Hip-Hop en France...
Je crois qu’on a fait quelque chose de pas mal (rires)... À cette époque, il cherchait un Dj pour passer de la musique américaine. Ils ont entendu parler de moi lors des rassemblements Hip-Hop “La Chapelle“ que j’organisais dans un terrain vague au nord de Paris. Ils m’ont proposé des émissions.
“Aujourd’hui, les Dj’s qui se disent Hip-Hop jouent de la merde, en en plus ils aiment ça !“
Tu ne le dis pas, mais c’est quand même à “cause de toi“ qu’on a eu droit aux NTM, Assassins, IAM, Ministère Amer etc... (Rires) !
(Rires). Oui, c’est moi qui leur ai donné de l’antenne sur “Deenastyle“ alors que personne ne les connaissait... On a enregistré des “Mix Tape“, après ils se sont débrouillés (rires)... Ce fut une grande époque de liberté d’expression et surtout de liberté culturelle.
Tu organisais également les mythiques soirées “Chez Roger boîte funk“ au Globo, une grande époque pour le Hip-Hop en club... Qu’en est-il aujourd’hui ?
Clairement il n’y a plus de Hip-Hop en club. Aujourd’hui c’est de la soupe que l’on sert aux clubbers. Avant les gens sortaient pour découvrir des sons qu’ils ne connaissaient pas, maintenant ils viennent écouter plus fort ce qu’ils entendent à la radio...
Ne te sens-tu pas un peu esseulé ?
Carrément ! Il y a beaucoup de Dj’s qui se clament Hip-Hop ! Ils jouent de la merde et en plus ils aiment ça... Pour ma part je continue à mettre en avant un Hip-Hop mature et indépendant. Le problème c’est que mon public est de plus en plus restreint.
Comment se porte le Hip-Hop aujourd’hui ? Comment juges-tu le rap en France ?
Le Hip-Hop en France est en déclin total, seule la scène underground subsiste tant bien que mal, mais combien de temps encore ? Des mecs comme Kalash, ATK ou Kohndo croit encore en ce qu’ils font. Concernant le rap, il y a de tout et n’importe quoi. Booba et les autres ne représentent pas la même chose. Même IAM m’ont franchement déçu... Des dj’s comme Cut (Killer) ou Abdel ont aussi dévié de la route. Ils ne montrent plus le bon exemple. Aujourd’hui, tout le monde peut jouer ce qu’ils jouent.
Aujourd’hui tu poursuis ta “lutte“ sur Radio FG tous les dimanches de 12h à 13h dans l’émission “Eclectic Brunch“. Comment s’est passé ton arrivée dans la “team FG“ ?
Quand Antoine m’a appelé, il m’a dit, on veut un Dj qui mette du vrai Hip-Hop, mais pas de rap français, c’est pas en image avec la radio. J’ai dit ok. Dans “Eclectic Brunch“, j’essaie donc de retracer un historique du Hip-Hop de la fin 70, période Electro, à maintenant.
Tu as exploré beaucoup de courants proches du hip-hop comme l’Electro, le funk, et même la House. C’est ton côté Eclectique ?
Peut-être, mais c’est surtout que tout cela ça fait partie de la même famille... Ensuite c’est une question d’opportunité... Aujourd’hui, “Electro“ est devenu un terme journalistique dans lequel on peut tout fourrer, mais il faut savoir que l’Electro est l’essence même de la plupart des genres musicaux...
Qu’est-ce qui t’angoisse aujourd’hui dans le métier ?
Ce qui me fout les boules, c’est de voir des Dj’s qui s’achètent “Serato“ ou “Final Scratch“ et qui, pour rembourser leur investissement, n’achètent plus de disques et téléchargent sur Internet. A bon entendeur...
Propos recueillis par Chris
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