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La Louée - Françoise Bouffière

Par Venise19 @VeniseLandry
La Louée - Françoise BouffièreSept visions* trônent à La Recrue en ce 15 du mois. En passant, nouveauté à La Recrue, un questionnaire à l'auteur. Bonne manière de connaître Françoise Bouffière qui s'y dévoile bellement. Des réponses captivantes et bien tournées. Ça commence bien !
*Sainte-Marie-des-Fossés
* Nouveaux atours pour un mal connu
* Prendre son destin en main ...
* "Savonner, frotter, rincer, étendre, ne pas penser ..."
* Un roman contemporain sur un drame du passé
* Parfum d'autrefois
La chair est centre, l'âme est flamme (Victor Hugo)
J’ai toute de suite embarquée, à pieds joints, dans cette histoire. Remarquez, je dis « histoire », pas roman, pas livre. J’avais une seule crainte, celle que l’on me retire brusquement mon plaisir. J’espérais que la constance du ton persiste, que l’histoire continue de couler aisément sous mes yeux avides. J’ai tellement aimé que cela m’a fait me demander ; pourquoi ai-je tant cette impression que l’on m’a raconté une histoire quant en fait, j’imagine, c’est la prétention de chaque romancier ?
C’est difficile à dire, encore plus à écrire. Je vais tenter une comparaison pour m’expliquer. Vous rencontrez des personnes qui, dans la vie, vous racontent des histoires, ne serait-ce que des anecdotes, il y en a qui, tout de suite, captent votre attention, vous embarquent. Ces conteurs, les vrais de vrais, ont un ton que j’appelle détaché. Ils entretiennent une distance avec leur histoire, tout en l’a possédant. J’ai cette impression qu’ils la regardent de biais, avec un certain recul, créant une distance avec leur émotivité, mais pas trop. Parce que s’ils s’en tenaient trop loin, ils en refroidiraient les ardeurs. Ils savent tenir un équilibre. Pour l’atteindre, il faut aussi, je crois, beaucoup aimer son histoire et éprouver un sincère plaisir à la raconter.
Voilà ce que j’ai senti en lisant La Louée. Et qui plus est, elle est diablement bien menée, cette histoire, pas linéaire du tout. Le personnage principal a juste le bon dosage d’innocence pour que l’on sympathise de tout cœur. On y croit, elle est vraie, attirante mais ne prend pas la place de l’histoire et ses sujets qui m’ont enchantés. Un de ces sujets, pourtant éculé, le contraste entre les riches de la haute et les pauvres campagnards ignares. Le dénuement si grand qui ne reste pas d’autre choix que celui d’offrir son corps dans un but difficilement plus digne : nourrir un bébé. Consentir à prêter sa poitrine laitière et recevoir un beau magot en échange. Bien sûr, l’idée de l’esclavage ne décollait pas de ma tête, je revoyais ces marchés où l’homme blanc allait acheter son « animal » humain le mieux portant pour le placer à son service.
L’injustice, l’innocence trompée, les illusions envolées, la maternité en marchandage, les mères amères, la chamade amoureuse trompeuse, la domesticité, la solidarité et la brave fierté des femmes, beaucoup de chair tendre recouvre l’ossature du roman La Louée. Et j’en prendrais bien une enfilade de cette nature !

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