On se rappelle de Pouchkine, grand poète russe tué par un soldat français, benêt. Voici la suite de notre saga : « Cherchez pas, les poètes russes l’ont déjà fait ».
Lili Brik. Vous la connaissez. Vous l’avez déjà vu. C’est notre pute russe à tous. On l’a ressorti récemment pour mieux la souiller, genre aucun respect. Elle est l’icône pop communiste de tous les graphistes à lunettes qui se touche la nouille à Chaumont en regardant leurs ronds rouges, leurs ronds noirs, un petit triangle et une meuf en culotte, sélectionnés pour un prix. Cette fille, telle une jeune pute russe héroïnomane, est passée sous tout le monde. Le monde poétique. C’est le modernisme. Lili Brik. Le nom aussi simplifié que le courant dont elle se fait égérie : Constuctivisme. On fait de l’art pour reconstruire le pays, on fait de l’art pour qu’il soit utilisé par le peuple. On quitte les chevalets, l’isolement, et on construit ce putain de pays avec nos putain de mains. On théorise comme des bâtards, on est un putain de mouvement halluciné, fasciné, moderne. Cette bande a posé, imposé et inspiré le graphisme moderne. Avec la revue Lef, entre autres, ils mettaient en scène leurs poèmes et nous balançaient dans la gueule leur esprit avant-gardiste et ultra moderniste sponsorisé par Lénine en personne (avec la ROSTA) qui n’hésitait pas à faire appel à eux pour un peu de propagande (Agitprop) quand il fallait piller les paysans qui crevaient de faim.
Lili Brik est surtout un putain de démon. Elle a hanté tous les mecs du mouvements. Ouais, Rodchenko, le “D.A.” de la bande. Une photo d’elle, un “petit” montage et impossible de se détacher de cette fille. Tu googles Rodchenko, tu te tapes Lili Brik. Pourtant le mec, il a passé sa vie à dessiner des petits carrés, à tout moderniser, avec sa femme Stepanova - dont le carré (ici ses cheveux) a été piqué par Mireille Mathieu et la meuf de Detect, il a bossé à fond avec l’USSR et c’est peut-être pour ça qu’on évite d’en parler : On a tout brûlé en 89. On ne retient que Lili. Huit décennies plus tard, on retrouve sa gueule sur une pochette de Franz Ferdinand et Rodchenko, il se dit “putain, vous n’avez pas d’imagination, hipster”. Il a raison. Lili Brik c’est genre George Sand vs Florence Rey vs Irina Belenkaya. Une égérie qui allume l’étincelle. Une égérie qui fout sa merde. Discrètement.
Comme souvent dans les histoires de cul des poètes russes, cf Pouchkine, ça commence avec une soeur. La petite soeur. Elsa, Elsa Kagan, née en 1896, elle rencontre un futuriste russe. Un putain de génie. Vladimir Maiakovski. Maiakovski, né en 1893, s’est battu contre les blancs : Les bourgeois, les tsars, les machins, et c’est en prison qu’il est devenu un poète, intéressé par les tarés d’italien et ce futurisme dingue. Tiseur de vodka, à la pointe de l’avant-garde avec son manifestes, ses onomatopées et sa poésie dessinée, il rencontre la très jeune Elsa. Pas loin il y a Osip Brik, né en 1888. Osip fait un peu l’amalgame de tous ses tarés, il avait cherché pendant ses études à faire une thèse sur les statuts sociaux et juridiques des putes de Moscou qu’il connaissait super bien, surtout il a rencontré, à dix-sept ans, sa Lilya Kegan, qui en avait quatorze. Mariage en 1912. On parle ici de gamins qui sont en train d’imposer des codes graphiques toujours d’actualité.
Été 1915, Elsa ramène son mec et le présente à la bande. Forcément Maiakovski tombe direct amoureux de Lili - Elsa, super triste, va alors se barrer en France et va rencontrer Aragon. Osef - Ça pose aucun problème à Osip, surtout qu’il trouve Vladimir génial avec ses poèmes. Cette histoire, il accepte à fond, Lili il la considère plus comme son âme sœur, il garde ses putes et s’offre des baises monumentales à trois. Tant qu’il y a de la création artistique, du brainstorming et surtout : Du contenu dans LEF, on peut y aller. Forcément l’histoire va partir en couille très vite. Ultra passionnelle, les deux n’arrêtent pas de rompre, de se rabibocher, la petite Lili pose pour tous les photographes russes, les peintres français et lui, putain, il se sent inspiré, il insulte tout le monde, il se réconcilie, c’est cool, un peu de cinéma : il scénarise pour Madame, etc. Avec en toile de fond : Une correspondance enflammée. Littéralement. Molotov. Il vit ça comme une putain de guerre le Vladimir.
La relation s’arrête en 1925. Maiakovski, en bon écrivain soviet, voyage gratuitement à travers le monde et, poète à fleur de peau, moderniste, il se retrouve forcément à New York où pas mal de russes (blancs - pas la couleur de peau mais la couleur du Tsar) se sont installés pour ne pas se faire découper par les bolcheviks. À New York, il rencontre Elli Jones, une émigrée justement et ça dure trois mois. Trois putains de mois où il emmène sa darlin sur le pont de Brooklyn, à Broadway, il la joue romantique russe à fond, ils font un gosse à Manhattan, dans un hotel genre : Big Class. Mais. Mais, celle restée au Pays, Lili, n’aime pas ça et balance une tonne de télégrammes (sorte de SMS de l’époque) et réclame de la thune à Vlad qui se sent harcelé. Il rentre, passe par Paris quand même. La petite Lili Brik, en bonne Joey Potter du constructivisme russe, pris le temps de cramer et de censurer toutes les preuves d’une relation entre Vlad et d’autres femmes et lui, tel un gros naze, va finir de déprimer en Russie. Pour y devenir légendaire.
Joueur de roulette russe, ce jour là, on est le 14 Avril 1930, il boit un peu. Il boit pas mal. Ils se font passer le pistolet, il écrit cette phrase : « La barque de l’amour s’est brisée contre la vie courante. Comme on dit, l’incident est clos. » il retourne le pistolet et le pose contre son coeur. Il lâche : « Soyez Heureux ». Pan.
Lili Brik, elle a beau avoir sa gueule partout, sur une pochette à chier de Franz Qui ?… Elle ne pourra jamais lutter contre cette force du poète. Elle se suicidera en 1978 après avoir passé sa vie à diffuser l’œuvre de Vladimir son bien aimé. « Soyez Heureux ».
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 19 février à 22:22
Il n'a jamais ecrit: soyez heureux. Quelle drole d'idee. Il a ecrit quelque chose de beaucoup plus effroyable: lyubyte menia. "Aimez moi".