Un dimanche matin, le narrateur, un écrivain argentin, est réveillé par une voix qu’il a du mal à identifier, celle de Luciana qu’il n’a pas revue depuis dix ans, dont il était pourtant tombé amoureux et qui l’appelle à l’aide. C’était elle, « la fille de la dictée », qui tapait en cachette le texte de son roman, parce qu’il s’était cassé une main et en l’absence du célèbre écrivain Kloster dont elle était alors la secrétaire personnelle.
Il ne la reconnaît plus tant elle semble avoir perdu toute séduction ! Elle lui raconte alors une très sombre histoire de morts successives touchant systématiquement tous ceux qu’elle aime et qui seraient dues à la vengeance de Kloster auquel elle a intenté un procès pour harcèlement. Elle craint désormais pour sa propre vie et surtout pour celles de sa grand-mère et de sa jeune sœur, les seules personnes de sa famille encore vivantes !
Ce début assez classique se transforme très vite en une suite de confrontations très tendues entre les trois personnages principaux pour savoir qui détient la vérité.Kloster se sent persécuté par Luciana qu’il voit comme une jeune fabulatrice atteinte de folie.
Celle-ci est convaincue qu’il n’est qu’un meurtrier qui réussit de façon diabolique à maquiller parfaitement la réalité.
Le narrateur, lui, oscille, perplexe, entre ces deux versions contradictoires, aussi convaincantes l’une que l’autre.
Nous, lecteurs, nous sommes comme lui, perdus entre plusieurs possibilités. S’agit-il de folie, de vendetta ou de hasard ?
Mais nous sommes en présence de deux écrivainsqui s’affrontent et se soupçonnent mutuellement à coups de citations bibliques et des Carnets de Henry James. Les pouvoirs de l’imagination et de la fiction rivalisent avec la réalité, ses mensonges, ses mirages et ses coïncidences.
Quant à moi, bien que les soupçonnant tous, tour à tour, je suis restée tout particulièrement admirative du dénouement. La fin est très finement réussie !
Quand j’ai commencé à lire ce livre, je ne me doutais pas que j’allais y consacrer une après-midi entière au détriment de toute autre activité !
Pas une seconde je n’ai senti passer les heures ! D’une écriture limpide, sans digressions inutiles, le récit m’a entraînée d’un début de roman classique, jusqu’aux vertiges d’un roman policier cruel et métaphysique à la fois, un thriller psychologique, très réussi dont la fin est éblouissante et vertigineuse ! Un tour de force sous l’influence de Borges, de Henry James et de la Bible ! Pas moins !
Citation mise en exergue : « Tout ce qui produit un choc, en physique, subit une réaction égale à celui-ci, mais en morale la réaction est plus forte que l’action. La réaction à l’imposture est le mépris ; au mépris, la haine ; à la haine, l’homicide. " Giacomo Casanova, « Histoire de ma vie »
La mort lente de Luciana B. deGuillermo Martinez (Nil éditions, septembre 2009, 251 pages) traduit de l’espagnol (Argentine) par Eduardo Jiménez. Titre original : « La muerte lenta di Luciana B. »
L’auteur, né en Argentine en 1962, mathématicien, traduit en trente-sept langues, est devenu l’un des écrivains argentins les plus importants de sa génération.
Ce livre a été lu dans le cadre du partenariat avec Blog-O-Book que je remercie.