Belle initiative de FR3 Normandie avec la diffusion pendant 24h sur Internet, à partir d'aujourd'hui, de l'opéra sacré Il Sant'Alessio de Stefano Landi.
J'avais déjà évoqué le dernier enregistrement de La morte d'Orfeo du même compositeur par l'ensemble Akademia (note du 24 juillet 2007).
Stefano Landi, contemporain de Monteverdi, a développé un style dont l'esthétique est proche de celle du maître de Mantoue mais qui, je trouve, se présente "en creux" par rapport à cette dernière : à l'expressivité, la lumière et la finesse monteverdiennes, Landi oppose d'habitude une rectitude rythmique, un détachement et surtout une noirceur très caractéristique.Dans le cas précis, on est dans une oeuvre d'une ambiguïté extrême, à la limite de la dérision. Cette oeuvre avait été créée en février 1662 pour le carnaval et cela n'a donc rien d'étonnant. Tous les rôles féminins doivent en principe être tenus par des hommes travestis. Il ne faut pas se détromper pour autant car, à cette époque, les femmes n'avaient pas le droit de se produire sur scène et c'étaient des castras qui tenaient les rôles féminins.
L'interprétation de William Christie et la mise en scène de Benjamin Lazar, recherchent une certaine véracité esthétique. La représentation comprend une bonne dose de second degré mais, comme à l'habitude chez le chef américain, avec beaucoup de subtilité. Le traitement de la lumière et des compositions scéniques ne sont pas sans rappeler les peintures vénitiennes de la Renaissance. A noter partculièrement, la présence de Philippe Jarrousky, prince des contre-ténors, dans le rôle titre de Saint Alexis.
Le début de l'opéra nous replonge jusque dans les racines les plus primitives de la musique de la Renaissance, notamment au minutage 14':50'' une scène dont la style grotesque rappellerait presque Clément Janequin !
Je ne suis pas, pour ma part fasciné par Stefano Landi. Le peu de compositions lyriques de ce compositeur que j'ai été amené à écouter me semble manquer invariablement de couleurs.
Il y en outre quelque chose de morbide et désespéré dans bon nombre arias et qui me dérange particulièrement.
Petite exception : un beau choeur d'enfants et d'adultes au minutage 26'.
Cette expérience de FR3 est tout de même à noter et initie de belle façon la diffusion d'oeuvres rares sut Internet que la télévision ne daignera pas diffuser au niveau national.
Cet opéra sera en outre interprété par le même ensemble au Théâtre de Champs Elysées le 23 novembre prochain.
Lien direct vers le site et la diffusion. Il est également possible de prendre connaissance de pas mal de détails sur les conditions de production de cet opéra méconnu.
Article du Figaro sur cet évènement.
NB : William Christie avait gravé ce même opéra il y a quelques années chez Erato. A découvrir également.