La présence d'un magnifique piano à queue était tout à fait logique, mais la bonne surprise, pour ma part, était de voir que Chris Garneau n'était pas seul sur scène. Après une belle entrée en matière en solo avec "Hands on the Radio", le jeune songwriter a été rejoint par une violoncalliste, le temps d'un soufreteux "The Leaving Song" : j'emploie le terme à dessein, car Chris semble à la peine, à genoux pour jouer de l'harmonium en chantant. Mais la suite ne sera qu'un ravissement, d'un bout à l'autre. Ben Shapiro arrive à la batterie, et comme dans un miracle, les arrangements et trouvailles mélodiques de "El Radio" sont très bien retranscrites, et contournées quand cela est obligatoire. "No More Pirates" et "Fireflies" sont légèrement accélérées, juste un peu moins extravagantes mais pour le coup avec un aspect plus "brut", qui en conserve tout le charme. Le set est surtout centré sur le dernier album, de "Music For Tourists", il y aura surtout "Relief", toujours déchirante, mais hélas pas de "Baby's Romance" ou "Between the Bars". Qu'importe, et c'est là toute sa force : Chris Garneau a déjà un répertoire conséquent, et "Over and Over" ou "Dirty Night Clowns" sont des titres extraordinaires, et qui font de cet Américain apparemment timide un de mes songwriters préférés. J'ai déjà hâte qu'il revienne.
Le MySpace de Chris Garneau
La chronique de "El Radio", la chronique de "Music For Tourists"
Le changement quand arrive Shannon Wright sur scène est brutal. Accompagnée de 3 musiciens, elle s'empare de sa guitare électrique sans un mot, presque sans un regard pour la salle. L'ouverture se fait sur "Tall Countryside" de "Honeybee Girls", son dernier disque. Mais il y a une tension sur scène, une fougue, même si le titre est plutôt calme...Elle est clairement très impressionnante sur scène, de par son charisme, son interprétation et son accès inaccessible. C'est un torrent de lave et d'émotions : le calme de certaines chansons laisse craindre le pire, et les morceaux les plus rageurs clouent littéralement au sol, car ils sont interprétés avec une force incroyable. Impossible pour moi de décrocher, c'est sûrement une des performances les plus intenses que j'ai vues depuis longtemps : derrière son groupe impeccable, il y a une femme qui est capable de vous glacer le sang sur "You'll Be The Death", instiller le doute sur "Defy This Love" ou vous tirer des larmes le temps d'un "Asleep" seule au piano.
Bien des titres du dernier album sont joués ("Black Rain", "Father"), mais les titres les plus rageurs de la carrière de Shannon ne sont pas oubliés, et il faut alors la voir maltraiter sa guitare, les cheveux devant le visage, sans un mot pour le public ou presque, mais ce n'est pas de la mauvaise volonté : elle est dans sa bulle, littérallement...Quand elle s'accorde, on entendrait une mouche voler, tant elle inspire le respect. Au bout d'une heure brûlante, et le temps de derniers soubresauts soniques, Shannon Wright se relève, pointe son coeur à plusieurs reprises et se retire. Le choc a été brutal, le poison violent, mais le charme irrésistible, la foi inébranlable : elle est l'une des plus grandes, si ce n'est la plus grande. Mille fois bravo, mille fois merci.
Le MySpace de Shannon Wright
La chronique de "Honeybee Girls", la chronique de "Maps of Tacit"