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Obligation de mise en garde du Banquier : une nouvelle décision importante
Publié le 11 octobre 2009 par YanngrePar un arrêt en date du 24 septembre 2009 (pourvoi n°08-16345), la première Chambre Civile de la Cour de Cassation rappelle que les Tribunaux sont tenus, lorsque l'emprunteur, poursuivi par sa Banque, invoque le caractère fautif et abusif de l'octroi de crédit qui lui a été consenti, de rechercher si cet emprunteur doit être considéré ou non comme un emprunteur averti et, dans la négative, si la banque a satisfait à son obligation de mise en garde, au regard des capacités financières de l'emprunteur et des risques d'endettement résultant de l'octroi du prêt.
Cet arrêt signifie donc qu'à défaut de pouvoir justifier qu'elle a bien rempli son obligation de mise en garde, la Banque engage sa responsabilité à l'égard de l'emprunteur considéré comme non averti.
Le texte complet de cette décision est le suivant :
"Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que la société GE Capital Bank, devenue GE Money Bank, qui avait consenti à Mme X... un prêt, dont le remboursement était garanti par un cautionnement solidaire souscrit par le fils de celle ci, l'a assignée en paiement du solde de la somme prêtée ; que reprochant à la banque de lui avoir fautivement octroyé le prêt, Mme X... a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages intérêts ;
Attendu que pour rejeter cette demande la cour d'appel, après avoir constaté que Mme X..., alors âgée de 71 ans, avait souscrit le prêt à l'effet de financer l'achat d'un véhicule automobile destiné à son fils, a retenu, par motifs adoptés, qu'il n'appartenait pas à l'organisme financier de s'immiscer dans la vie privée de ses co contractants, que lors de la souscription du contrat Mme X... avait déjà des revenus inférieurs au montant de la mensualité de remboursement du prêt, laquelle s'élevait à 1 827 euros quand ceux ci atteignaient mensuellement la somme de 690 euros, de sorte qu'elle ne pouvait qu'être pleinement consciente qu'il lui serait difficile d'honorer ses engagements, et, par motifs propres, que si Mme X... et son fils avaient fait le choix délibéré de laisser celle ci souscrire seule le contrat de crédit, il leur appartenait d'assumer les conséquences du montage financier qu'ils avaient souhaité, et en a déduit que la preuve d'un manquement de l'organisme financier à son obligation de prudence et de conseil envers Mme X... n'était pas rapportée, celle ci ayant contracté en pleine connaissance de cause ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs desquels il ne résultait pas que Mme X... eût été un emprunteur averti, quand il lui incombait de préciser si tel était, ou non, le cas et, dans la négative, si conformément au devoir de mise en garde auquel elle était tenue à son égard lors de la conclusion du contrat, la société GE Money Bank justifiait avoir satisfait à cette obligation à raison des capacités financières de Mme X... et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais uniquement en sa disposition rejetant la demande en paiement de dommages intérêts formée par Mme X..., l'arrêt rendu le 4 décembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la société GE Money Bank aux dépens."
Yann Gré - Avocat à la Cour, tous droits réservés. www.yanngre.com