Murray Perahia révèle en effet ces partitas sous un autre jour, sous le signe d'une sérénité et d'une hauteur de vue impressionnantes. Son toucher charnu, la plénitude sonore de son Steinway se trouvent entièrement dévoués au déploiement majestueux de la polyphonie de ces partitas, sans aucun travers, aucune faute de goût, et qui pourraient constituer les pièges typiques des interprétations sur piano moderne. A la dureté d'un travail qui serait par trop rhétorique et contraint par une approche "claveciniste", Murray Perahia oppose la respiration, l'ampleur et le rendu de nuances que permet le piano. Nul doute, comme il le mentionne lui-même, que JS Bach, ayant déjà pratiqué les tous premiers modèles de piano forte, gardait en tête ce jeu des nuances. Pourquoi alors s'en priver en asséchant l'interprétation par une vision qui serait trop axée sur la pure transparence et la netteté de la ligne polyphonique, au détriment des couleurs et de la richesse des timbres ?
La partita dont la version est emblématique de cette approche est indéniablement la superbe 6ème. Dès la Toccata d'introduction, la richesse des couleurs est impressionnante et la fugue se dévoile progressivement en atteignant une ampleur saisissante. Ensuite, les autres mouvements viennent encore contribuer à la puissance narrative de cette interprétation. Du très grand art.
Lien direct vers une interview de Murray Perahia pour Classica et qui éclaire tout à fait sur son approche esthétique et ses références musicales.
Indéniablement, comme pour 2008, ce recueil de partitas constitue un des plus beaux coups de cœur de l'année.
Court extrait (Allemande de la 6ème partita) - avec cette Allemande, si vous vous procurez le disque Haendel de Racha Arodaky, vous serez marqué(e) par la filiation naturelle entre ces deux pianistes. Racha Arodaky a été élève de Murray Perahia. Indéniable.
Coup de cœur du Poisson Rêveur.