ce texte, publié le 12 juin 2007, témoigne déjà de notre inquiétude sur les dérives antidémocratiques et la mise à mort du régime
républicain.
Après l’effroyable boucherie que fût la guerre de 14-18, l’opinion s’accordait à clamer " plus jamais çà ". Eviter la " barbarie ", c’est un peu
comme crier " au loup " tellement c’est devenu un lieu commun sur lequel tout le monde s’accorde encore. Si l’opinion ne vient pas de rien, elle se construit, s’oriente et se manipule
comme jamais dans l’histoire de nos sociétés. Elle se fabrique, comme n'importe quel objet utilitaire, manufacturé et il y a même des officines pour cela. Malheureusement c’est toujours après les
faits que cette opinion réagit. Elle attend les preuves par l’événement quelque soit l’horreur de celui-ci. En fait, elle croit savoir au travers de ce qui est instillé par la force dominante du
moment. Malgré tout les catastrophes se succèdent . Elle a également le pouvoir d’accélérer le processus des mouvements destructeurs, ce qui est confirmé à la veille de chaque événement
d’ampleur. Les opportunistes ont toujours su utiliser les courants en les suivant, en les flattants afin d’en récupérer des dividendes politiques.
Le socialisme a lutté à contre-courant pour exister et également pour s’imposer comme force sociale et politique. C’est le combat idéologique pour modifier le
courant de l’opinion. Ce combat, Jean Jaurès le paiera de sa vie.
Si nous savons aujourd’hui que le fascisme mène à la catastrophe, c’est après l’avoir vécue et quelle reste présente dans les mémoires. Il est l’expression d’une
époque, d’une crise et d’une mutation du système économique, dont le nationalisme autoritaire a été la particularité. Il a été une forme de l’idéologie dominante à un moment donné de l’évolution
du capitalisme. On connaît la suite.
Certes, une page est tournée et une autre forme d’autoritarisme est en train de se profiler et c’est dans ce sens que s’oriente l’opinion, forte de la conviction
inverse. Elle croit que la mondialisation est son avenir, alors que celle-ci est incompatible avec la démocratie. Le nationalisme est dépassé, même s’il reste ici et là des traces apparentes et
il fait place a une autre forme et à un autre stade du développement du capitalisme, la mondialisation libérale avec sa nouvelle donne idéologique. Derrière, un nouvel autoritarisme se dessine,
qui gagne du terrain, au point d’influencer à l’intérieur de la gauche partout où le libéralisme est d’actualité. Il y a partout dans son sillage la même approbation, au cœur de ceux qui ont
intérêt à le combattre.
Nationaliste ou mondialiste, l’autoritarisme n’est qu’un moyen d’imposer causes et conséquences des nouvelles restructurations. Il marque un début ou une fin de
cycle du capitalisme. Il n’y a qu’à observer comment s’opèrent les délocalisations. Où vont-elles ? Jamais dans des endroits de droits où le système démocratique est développé. Les
investissements se réalisent dans des pays à faible coût de main-d’œuvre, dont la condition des salariés s’apparente d’avantage à l’esclavage et où les régimes sont stables et autoritaires. Bas
salaires, pas de cotisations sociales, pas de congés, pas de retraite, pas de limitation du temps de travail, pas de droit de grève et des syndicats hors la loi, travail des enfants. A cela il
faut ajouter, pas d’école , pas de droit à la santé et souvent, pas de droit de vote et aucune considération pour la dignité humaine. Quand un certain nombre de ces droits existent, ils sont
parfaitement limités. Voilà vers où et vers quoi se tourne l’argent investi par " l’humanisme libéral ". Penser que ce nouveau prolétariat en restera là, c’est se tromper et il ne
pourra se libérer qu’au prix d’affrontements à moins que nous considérions ( l’opinion) qu’une partie de la planète doit vivre sous le joug de l’esclavagisme moderne. Où sont-ils les
humanistes ?
Dans nos pays avancés, les programmes respectifs des libéraux ressemblent étrangement à ce qui existe déjà là où ils délocalisent. Pour y parvenir une nouvelle
forme d’autoritarisme est nécessaire afin d’imposer les nouveaux rapports " Capital-Travail ". Suivre l’opinion et décréter que celle-ci a définitivement raison , c’est prendre le
risque de la Barbarie.