Cette semaine, une photo est proposée par les impromptus pour tout support avec un
thème : bac à noeuds...
Pour ma laverie in aqua, c'est LA!!
Photo de Falk, source "Library of Congress", wikimedia commons, domaine public.
Les sourires ébauchés timidement et les joues rosies par l’air frais peinent à dissimuler le trouble des esprits.
Pour conjurer la peur, une lavandière entonne une ritournelle bientôt reprise par une autre jeune fille, puis une autre encore…
Des silhouettes cassées, penchées sur la besogne s’élèvent une mélopée ancestrale qui se révèle d’une nouvelle signification pour qui prête l’oreille.
Les poitrines mutines se soulèvent sous les élancements des notes aigues qui font vibrer les corps – presque- sages. Les coups sourds de ces demoiselles s’abattent sur le linge et se synchronisent machinalement sur le rythme de la chansonnette tandis que les membres éclaboussés par l’eau savonneuse s’activent au labeur.
Ce rythme…
Comment ne pas le comparer avec celui des bottes de ces messieurs, les officiers étrangers qui défilent fièrement avec leurs troupes dans les villes à genoux et les modestes bourgs affligés ?
« Tapez, tapez, jeunes lavandières…
Souriez, souriez et portez fier…
Ces messieurs en armes ne savent pas…
Non, ces messieurs ne se doutent pas… »
Les mains redoublent d’activité, enhardies par les pensées qui convergent vers un seul et unique but.
Les bacs s’emplissent de linges noués qui passent subtilement de main en main : de celles qui demeurent en bas du village à celles qui regagneront les dernières habitations bordant le massif forestier, tout en haut.
« Tapez, tapez, jeunes lavandières…
Souriez, souriez et portez fier…
Ces messieurs en armes ne savent pas…
Non, ces messieurs ne se doutent pas… »
Ce soir, ceux qui luttent et meurent pour notre liberté assembleront les armes et les explosifs dissimulés au cœur du linge noué.
Non, ces messieurs
en armes ne savent pas encore quel goût sanglant aura la liberté chèrement défendue…