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Peut-on manier l’eau et l’électricité sans provoquer de court-circuit ? Quelques questions d’actualité

Publié le 09 octobre 2009 par Jblully

Peut-on manier l’eau et l’électricité sans provoquer de court-circuit ? Quelques questions d’actualitéHenri Proglio, actuellement Président du groupe Véolia vient d’être nommé à la tête d’EDF. A sa demande, les statuts de Véolia, qui est aujourd’hui une SA à Conseil d’administration, seront modifiés afin de mettre en place un régime de gouvernance dualiste (SA à Directoire et Conseil de surveillance) qui lui permettrait de conserver une place en qualité de président non exécutif.

Cette évolution, si elle est adoptée, par l’assemblée générale extraordinaire de Véolia (qui devrait se tenir début novembre) d’une part, et par le Parlement d’autre part , viendrait créer une situation quasi inédite dans le club des patrons du CAC 40. Car, en règle générale, les PDG des grands groupes français ne siègent dans les conseils d’administration d’autres sociétés importantes, qu’au titre de « simples » administrateurs.

Mais à bien y regarder, il existe déjà quelques cas dans lesquels deux postes de présidence sont cumulés : Jean-Cyril Spinetta est Président du Conseil de surveillance d’Areva et du Conseil d’administration d’Air-France KLM ; Jacques de Chateauvieux est Président du Conseil de surveillance d’AXA et PDG de Bourbon ; Gérard Mestrallet est, quant à lui, PDG de GDF-Suez et Président du Conseil d’administration de Suez environnement. Juridiquement en effet, il n’est pas interdit de cumuler deux postes de président du Conseil d’administration ou de Conseil de surveillance. Là n’est donc pas la question qui taraude l’opinion publique.

En fait, ce qui semble générer des inquiétudes tient plutôt à la question de savoir si cela ne serait pas trop pour un seul homme que de gérer ces deux énormes ensembles représentant près de 500.000 salariés.

A cet égard, la transformation de Véolia en SA à directoire et conseil de surveillance n’est pas neutre. Elle semblerait bien impliquer un désengagement de M. Proglio de son rôle exécutif dans Véolia.

En effet, selon l’article L. 225-35 du Code de commerce, « Le conseil d’administration détermine les orientations de l’activité de la société et veille à leur mise en œuvre. Sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux assemblées d’actionnaires et dans la limite de l’objet social, il se saisit de toute question intéressant la bonne marche de la société et règle par ses délibérations les affaires qui la concernent. ». On ne pourrait être plus clair : dans une SA « classique », c’est le conseil d’administration et a fortiori son président qui détermine la politique de l’entreprise et en impulse la dynamique.

Il en va tout autrement dans les SA dualistes dans lesquelles la gestion de la société est assurée par le directoire tandis que, selon l’article L. 225-68 du Code de commerce, « le conseil de surveillance exerce le contrôle permanent ». Ainsi, il n’a aucunement vocation à s’immiscer dans la gestion. De cette manière, M. Proglio pourrait donc consacrer le temps nécessaire à la gestion d’EDF tout conservant chez Véolia des fonctions de contrôle exclusivement.

Toutefois, M. Lebègue, Président de l’IFA rappelle, dans Les Echos du 30/09/09, qu’en pratique, ces différences sont le plus souvent minimes. Il n’est en effet pas rare que les membres d’un conseil de surveillance débattent sur la stratégie d’une société ou qu’ils créent des comités (d’audit, des rémunérations..) comme dans les SA à conseil d’administration.

En tout état de cause, une réponse en droit n’est qu’une réponse en droit, et peut s’avérer plus théorique que pratique.
Par ailleurs, les fonctions étant que ce que les hommes en font, il est tout à fait concevable qu’un président de conseil de surveillance soit plus actif encore qu’un président de conseil d’administration…

En tout état de cause, une réponse en droit n’est qu’une réponse en droit, et peut s’avérer plus théorique que pratique.

Rappelons ici que a formule dualiste est généralement utilisée pour faciliter psychologiquement les changements de dirigeants, et mener en douceur les transitions.

Le scénario ainsi envisagé est-il vraiment destiné à créer les conditions sereines d’un tel changement chez Véolia ? L’avenir nous le dira… et l’on saura combien de temps on peut manipuler l’électricité en gardant les pieds dans l’eau sans provoquer de court-circuit.


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